par Laure O'Jef
Rencontrer Maître Janus ne relève pas de la gageure.
Il n'est pas cet être de papier et de pixel pour celles et ceux qui s'arrêtent vite et ne creusent pas profond.
Il est vivant. Il bouge, il respire.
Il a un coeur qui bat et une tête qui pense. Assurément, du sang coule dans ses veines quand on le voit rougir.
Maître Janus me reçoit dans sa boîte d'allumettes (grand modèle) dans un vieil immeuble du centre-ville d'une rue imprononçable d'une ville importante du Sud de la France.
Ca ne paye pas de mine.
"C'est la maison natale du paléontologiste Henri Douvillé. Un jour, peut-être, on apposera une plaque. Pas pour lui. Pour moi. "Ici a vecu Maître Janus."
Magalo, le personnage ? A
peine. On s'aperçoit vite qu'il joue à l'être.
"Asseyez-vous où vous pouvez." ironise mon hôte. "Par où on commence ? Dites-moi, c'est pour un blog littéraire ou un blog érotique ?"
"Vous savez, si je n'avais pas été autant terrorisé par les femmes, je ne serais pas devenu ce que je suis devenu."
On le dit excellent dominateur. En fait, avant de trouver sa véritable
identité sexuelle, il a dû se confronter à pas mal de tourments. Il était attiré par les lieux de culte sadomasochistes, mais n'osait pas entrer. Ou alors il entrait mais restait au dernier
rang.
Il se dit avant tout fétichiste. Les bottes et les cuissardes le fascinent, comme serait fasciné un enfant.
Il est facile de vérifier qu'il est plus sensuel que sexuel.
Sa voix, douce et posée ; son choix des mots, ce ton un peu précieux détonent avec son physique de rugbyman.
S'il a réussi à être un électron libre dans ce milieu qui interroge, ce n'est pas sans s'être posé bien des questions. Pour être en paix avec sa conscience, et en harmonie avec son corps, il a dû
s'inventer des compromis. Et surtout un univers particulier (Voie encadré) où celles et ceux qui l'ont visité sont revenus radieux.
Sur la sexualité, il a son mot à dire. "Il faut en finir avec cette hypocrisie induite par le sexe."
Les frustrations, l'ignorance, les non-dits, les interdits, les tabous ont
fabriqué trop de névroses.
"Le jeu social est un jeu érotique." se plait-il à dire. "Alors, arrêtons de nous voiler la face et de nous cacher derrière notre petit doigt."
Pendant longtemps, Janus a
vécu sa sexualité en classe clandestine. Il oscillait des deux côtés du fouet, ne sachant s'il prenait plus de plaisir à recevoir la lanière ou tenir le manche.
"Un soir, j'ai reçu sans déplaisir 103 coups de fouet. Je me disais que je n'étais pas normal, mais que je n'y pouvais rien, et n'en parlais à personne. Et si , parfois, j'aime fouetter, ce
n'est pas pour me venger d'une quelconque maldonne, contrairement à ce qui est souvent écrit, mais bien parce que je sais qu'il y a du plaisir de l'autre côté."
Protéiforme, il l'est
assurément. Ce n'est pas pour rien qu'il s'est octroyé le pseudonyme de Janus, ce Dieu à deux têtes. Dominant et dominé, son jeu accorde une grande importance au renversement des rôles, à
l'alternance, donc à l'égalité.
Aujourd'hui, le projet -plus que le rêve- qu'il caresse est de rendre la liberté à chacune et chacun.
Rencontrer Maître Janus ne relève pas de la gageure.