14 juillet 2007 6 14 /07 /juillet /2007 15:31
A Pierrot,
L'Horloger.

Une lettre à Olivier Todd.
Cher Monsieur,
J'ai longtemps hésité à vous écrire.
La sortie de votre livre "Carte d'identités" me donne l'occasion de le faire, et je remettrai ce pli aux bons soins de votre éditeur.
J'apprécie la justesse et la finesse de votre regard et de vos propos. Et j'en sais aussi le courage que vous assumez.
Aussi me permettez-moi d'aller droit au but.
Je suis un fervent inconditionnel de Jacques Brel, et il va sans dire que j'ai lu -et relu plus d'une fois- la biographie que vous lui avez consacré.
Or, si exhaustif qu'il soit, ce texte, dense et riche, bien étayé, me laisse, avec le nécessaire recul du temps, insatisfait et gêné.
Pourquoi ?
(Il ne serait pas si bon, je n'aurais pas pris la plume, mais il se trouve qu'il fait référence.)
La phrase qui va suivre m'embarrasse, et pourtant, baste ! je me lance...
Jamais vous n'évoquez une rencontre importante dans la vie de Brel : celle qu'il fit avec Paul Touvier.
Ouis, je sais le soufre qui l'entoure...
Pourtant, il suffit d'utiliser les outils dont nous disposons aujourd'hui pour savoir que Brel s'est pris de sympathie pour l'ancien milicien et a notamment participé à l'élaboration d'un disque "L'amour et la vie" destiné à l'Education Sexuelle, pour "expliquer l'amour et la naissance aux jeunes." - dont l'écoute m'aurait personnellement évité, à l'époque, une belle carence affective et les nombreux TOC que je présente aujourd'hui- et édité par Philips, je crois.
Bien sûr, j'imagine que les hâtifs de la polémique se seraient empressés de servir du "Brel collabo" ?
Est-ce pour cela que vous avez fait l'impasse sur cet épisode important de la vie d'une figure marquante du XXe siècle ?
Ou bien y-a-t-il eu pression de la famille ? Omission volontaire ? Que sais-je encore ?
Que Brel et Touvier se soient approchés ne me dérangent absolument pas. Ceci n'enlève rien à la forte action-attraction de Brel, ni n'entâche son image. Ce qui me dérange plus, c'est -dans le souci de détail qui a été le vôtre- que vous n'en ayez pas rendu écho.
Si cette lettre vous gêne, jetez-la, oubliez-la...
Mais je serais content si vous y répondiez, simplement.
Je vous prie de croire, cher Monsieur, en l'expression de mes sentiments les meilleurs.
Joël Fauré
P.S. : Au moment où je rédigeai ces lignes, j'avoue que je n'avais pas lu votre livre, et surtout le passage qui répond en partie à ma question.
Tant pis ! Je poste quand même et aurais peut-être le plaisir de recevoir en retour quelques éclaircissements de plus ?
Enveloppe timbrée jointe.

L'inévitable guirlande autour du sapin de décembre...
Savez-vous pourquoi le sapin a les boules ? Parce qu'il s'est fait enguirlander...

Noël 2003 : Falloir mourir.
Mon père, Fernand, Pierre, Guillaume est mort le 25 décembre 2003, jour de Noël, à midi et quart, après avoir pris son repas, assis sur une chaise, dans la cuisine, en douceur, d'un arrêt du coeur, rose des vents sud-sud-est, juste en vis-à-vis du sapin qu'il m'avait aidé à planter. A tout jamais, mon père sera un Père Noël et le sapin de Pif un sapin de Noël. Il a rejoint Charlot, qui lui aussi, s'est éteint un jour de Noël...

Dire que Fernand est mort...

Noël 2004 : Faillir mourir.
Je ne supporte plus Noël et tout ce qui va avec. L'inévitable guirlande, installée dès fin octobre, m'étouffe. Les boules m'étranglent. Je n'aimais pas les rendez-vous convenus, les joies obligatoires, le sucre concentré, les jours fériés, les débordements festifs ; je déteste Noël. Les serpentins, les langues de belle-mère... c'est dans ces moments-là que j'éprouve presque de la sympathie pour le Père Fouettard...
Donc, c'est le Noël d'après le Noël de la mort de mon père. Il est presque 19 heures. Nous sommes entre chien et loup. Comme souvent, la mélancolie surgit et m'enveloppe de son manteau morbide. De ses puissantes mâchoires, elle me tenaille le cerveau. Mais il y a plus que ça. Je sens la terre se dérober sous moi, la tension monte, le coeur palpite ; je sens mon cerveau se bloquer, prêt à exploser : je me vois mourir.

La mort est féminine. Je la voudrais brune aux longs cheveux, portant de longues cuissardes noires à talon-aiguille...

"Avec Brel, j'ai pas de TOC..."
Toutes mâchoires absentes, Brel mort est pour moi beaucoup plus fréquentable et moins polluant que bien des vivants qui m'entourent. Lorsqu'une angoisse -qui est très humaine, finalement- cherche à devenir une obsession, je fais appel à lui. Et ça marche ! N'y voyez-là aucun mysticisme. Je vous répète que je me sens très proche de Jacques Brel.

A l'angle de la rue Pharaon et de la place des Carmes, il y a toujours une femme qui attend. Elle a ses bras de plâtre dans la chair.
Ma mère ne fait plus d'interview de chanteur à domicile. Elle est rentrée de plain-pied dans la chanson de Brel "Les Vieux" et passe "du lit au fauteuil,  puis du fauteuil au lit et puis du lit au lit".
Le sapin de Pif doit bien mesurer de 8 à 10 mètres.
L'éditeur a été très gentil avec moi : nous avons choisi ensemble la police de caractère.
Place Esquirol, la marquise de "Midi-Caoutchouc" s'est refait une beauté.
Sur la colonne Morris, il y a une affiche du dernier film avec Monica Bellucci.
Or, il se trouve que je connais très bien Monica Bellucci.

FIN

Joël Fauré

Ce texte a été créé le 11 février 2006 par Roger Borlant, au Théâtre de Poche de Toulouse, dans le cadre du "Gueuloir de Poche"

-----
Brèves:

Madonna et Michael Jackson ont des problèmes de logement.

"Viens chez moi, j'habite chez un fan."
Deux entrefilets dans la presse régionale ("La Depêche du Midi" et "Le Petit Journal") m'ont alarmé sur la situation de Madonna et Michael (deux régionaux de l'étape !) quand à leur maison. Si on peut faire quelque chose pour eux, contactez-moi.
"La Dépêche du Midi" du 27 juin : "La chanteuse Madonna a acheté une nouvelle propriété pour 9 millions d'euros, contiguë à la maison qu'elle possède à Marylebone, quartier central et huppé de Londres. La pop star posséderait au moins 5 propriétés dans la métropole où les prix de l'immobilier atteignent les plus hauts sommets du monde : la hausse est telle que les maisons se font rares dans le centre-ville et atteignent des prix faramineux."
"Le Petit Journal"
du 13 juillet : "Le chanteur de Thriller a emménagé à Las Vegas. Michael Jackson a choisi une luxueuse propriété, dont la valeur a été estimée à environ 40 millions d'euros. Le chanteur a été contraint de quitter son manoir de 10 pièces qui se trouvait non loin de Sin City, dans le Nevada, parce que le bail de location était arrivé à son terme."

*

"Des urinoirs et des souris blanches."

Bon, je sais, le titre est un "à-peu-près" mais c'est pour ouvrir cette "brève" et faire mieux "passer" le "cru" qui suit.
"Le Monde des Livres"
d'hier a titillé ma libido, et ses instincts refoulés, et sa face noire, avec un grand papier, éloge d'un livre sur les "pissotières" et ce qui s'y passe parfois.
Il fait écho à une tranche des "carnets de Raoul Jefe" publiée dans ces colonnes le 28 mai dernier.
"En argot anglais, "tearoom" désigne les "tasses", c'est-à-dire les pissotières. L'ouvrage s'attache donc aux pratiques sexuelles entre hommes dans les toilettes publiques." écrit Louis-Georges Tin. Qui poursuit : "Entre avril et octobre, c'est "la période de chasse". Les tasses les plus courues se reconnaissent aisément au nombre de voitures garées à proximité. (...) L'interaction sexuelle est un jeu où chacun joue son rôle. S'y rencontrent les pointeurs et les pointés (selon la fonction qu'ils adoptent dans l'acte fellatoire), les guetteurs (poireaux, onanistes ou voyeurs), les hétéros de passage, les loubards et la police. Mais les rôles sont souvent instables : ainsi, quand arrive l'âge critique (autour de 35 ans), ceux qui se faisaient "sucer" acceptent de plus en plus l'autre position ; de même l'hétéro d'aujourd'hui est souvent le pointeur de demain ; les loubards aiment bien se faire sucer de temps en temps, avant de casser du pédé ; et les policiers n'hésitent pas à faire du chantage comme les loubards, pour alimenter... les fonds de charité. (...) Quel est le public des tasses ? C'est M. Tout-le-Monde. Les pissotières sont des lieux démocratiques, auxquels chacun peut accéder sans payer, et s'y retrouvent des hommes noirs ou blancs, de tous milieux, de toutes religions. Loin d'être des marginaux, les participants sont souvent des citoyens rangés, voire plus conservateurs que la moyenne."

Ah ! J'ai oublié de vous dire le titre du livre : "Le commerce des pissotières. Pratiques homosexuelles anonymes dans l'Amérique des années 1960. (Tearoom Trade)
Mais en France aussi nous avons des pissotières et nous sommes en 2007. Pour celles et ceux qui souhaiteraient écrire un livre...

"Le commerce des pissotières. Pratiques homosexuelles anonymes dans l'Amérique des années 1960. (Tearoom Trade) de Laud Humphreys. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Henri Peretz. Préface d'Eric Fassin, postace de Henri Peretz, La Découverte, "Textes à l'appui/genre et sexualité", 202 pages, 20 €

JF



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commentaires

J
Camille : Le meurtrier revient toujours sur les lieux de son meurtre.
Répondre
C
Cet article résume parfaitement l'ambiance du thriller...si j'ai bien compris, le meurtrier court toujours....Camille.
Répondre

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