21 août 2007 2 21 /08 /août /2007 19:28
Une lettre de ma mère au docteur F.
"Mme Fauré Marthe
Les Rouquiès
31660 Buzet-sur-Tarn

Le 10 août 97

Monsieur,
Je me permets de vous passer ces quatre lignes, pour porter à votre connaissance ma souffrance et mon désespoir, occasionnés par votre légéreté et votre incompétence.
Souvenez-vous, en 1972, vous avez opéré mon fils, alors âgé de dix ans d'un phimosis. Opération entièrement "loupée" puisqu'elle aurait dû être pratiquée par un chirurgien. Depuis, il en est ressorti plein de séquelles, supportées par lui et tous les membres de sa famille. Sexualité anéantie, dépression, psoriasis, spasmophilie, troubles obsessionnels compulsifs, et tout ce que cela comporte de désagréments pour tout son entourage.
C'est si facile d'abuser de la naïveté des individus, mais sachez que ce sont des vies que vous avez démoli. Cela, il fallait que vous le sachiez, et c'est le cri de douleur d'une mère impuissante devant la réalité.
Vous avez des enfants, que cela vous donne à réfléchir."

Précision à toutes fins utiles : cette lettre n'a pas été envoyée.

Recettes.
Vous avez en ce moment un livre de recettes de cuisines entre les yeux. Je vous en supplie, si vous allez voir ma mère, dites-lui que j'écris des livres de recettes de cuisine. Et rien d'autre. Ca lui fera tellement plaisir.

Pâte feuilletée.
Une livre de farine, un peu de beurre, un verre d'eau, une cuillerée à café de sel fin, une cuillerée à café de levure.
Pétrir et laisser reposer la pâte jusqu'au lendemain en la couvrant d'un linge.
Le lendemain, prendre le beurre qu'on introduit dans la pâte et faire 3 plis.
Une fois les 3 plis faits, en faire 3 autres en sens contraire et avec le rouleau élargir la pâte de l'épaisseur de 2 sous et laisser reposer 1/4 d'heure, et recommencer 3 ou 4 fois, ce qui s'appelle faire chaque fois un tour. Ne pas trop fariner et ne pas partager la pâte avec le rouleau.

Rapport du docteur L.
"Je viens de voir Monsieur Joël F. qui présente une brièveté du frein entraînant une dysérection.
La meilleure solution est d'envisager l'arrangement du frein sous anesthésie locale."

Recettes.
Vous avez en ce moment un livre de recettes de cuisine entre les yeux. Et rien d'autre.

Pâte levée.
De la farine, du beurre (la moitié du poids de la farine), des oeufs suivant les ressources.
Cette pâte lève grâce à la levure qu'on y ajoute.
La levure achetée à la brasserie ou à la boulangerie est vivante, il ne faut pas la tuer avec trop de chaleur ou de sel, mais la délayer dans une tasse de lait tiède, puis la mélanger soigneusement à la pâte qu'on place à l'abri du froid dans une chaleur douce.
La levure agit et fait gonfler tout doucement la pâte qu'on fait ensuite cuire à four pas très chaud.
Cette pâte sert à faire la tarte et plusieurs variétés de beignets et de brioche.

Rapport du docteur M.
"Je soigne depuis plusieurs mois Monsieur Joël F. qui présente d'authentiques Troubles Obsessionnels Compulsifs invalidants et très importants.
Avec beaucoup d'humour, il tente de les compenser et de mener une vie normale.
Actuellement, il vient de subir une intervention correctrice à la suite de séquelles d'une intervention sur phimosis.
Il est en convalescence pour quelques jours à la clinique."

Recettes.
Vous avez en ce moment entre les yeux un livre de recettes de cuisine. Et rien d'autre.

Pâte brisée.
Farine, au moins la moitié poids de beurre, une pincée de sel, un verre d'eau par livre de farine.
C'est une pâte lourde servant de fond pour les tartes, tartelettes de croûte au pâté, aux chaussons.
Cette pâte est plus sèche que la précédente ; il faut la finir à la main. Lui laisser 1/4 d'heure de repos pour lui faire perdre son élasticité, puis l'étendre assez mince.
La cuire à four très doux sinon elle se déssèche et durcit. En y ajoutant autant de sucre que de levure, on obtient une pâte à petits gâteaux genre sablés.

Dans la vie en vrai.
Tous les hommes passent des mains de leurs mères à celles de leurs femmes.
Je suis passé des mains de ma maman à celles du néant.

(A suivre.)

Joël Fauré.

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commentaires

A
Non, Joël, votre relation aux femmes est loin de pouvoir être appelée le "néant"...
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