15 novembre 2007 4 15 /11 /novembre /2007 20:20
"SIDA :
Il y a deux syllabes de trop
dans ce mot

Dans un état que l'on peut imaginer sans renfort de littérature superflue, je fus reçu par un médecin aussi chargé de mission que l'ange Gabriel, porteur du message divin à Marie
"Vous n'avez pas le sida" me dit-il. Il y a deux syllabes de trop dans ce mot. Là sur le papier vert espoir était écrit : "sérologie LAV-HTLV III Elisa (Pasteur-Abbot) : Négative."
J'ajoutai dans ma poche ce document estampillé : Individu non contaminé par l'amour mais très abîmé par lui."


Pour obtenir mon petit diplôme de gratte-papier, on me demande d'accomplir un stage en entreprise. Je choisis la Fondation Jacques Brel, à Bruxelles. Autant joindre l'utile à l'agréable...
Bruxelles. Au hasard de mes flâneries, je m'engageai un jour, au sortir de la place de Brouckère, dans une rue qui, par son nom, avait retenu toute mon attention : la rue du cirque. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, cette rue ne conduit pas au Cirque Royal, situé plus loin, mais elle recèle bien des sensations et réveille chez le passant les sens parfois interdits : des cabarets inondent de lumière jusqu'aux trottoirs ; dans leurs présentoirs-programmes, des photos sont punaisées sur la rouge feutrine : des "pharmaciennes" en cuir jusqu'au coude, jusqu'au genou, et même un peu plus, se donnent en spectacle. Guère plus loin, c'est dans les vitrines bleutées et la lumière tamisée que l'on peut les voir, en chair et en os, et toujours en bottes.
Il n'en fallait pas plus pour rouvrir les portes de mon musée baroque, d'autant plus que les filles, dans leurs boutiques, à la fois produits et exposantes, m'interrogeaient de leurs plus beaux sourires pour une leçon de choses qui n'était pas bien sue.
Quand on ne croit plus au Père Noël, on croit au Père Fouettard. Elles en ont les attributs : les bottes, le fouet. Elles m'invitent à y goûter.
Je quittai la rue. Pour mieux y revenir, deux jours plus tard. C'est décidé : il faut corriger mes vues de l'esprit !
Pour avoir tant tardé à honorer les femmes ; pour les étreindre aussi mal puisque aussi peu ; pour connaître plus de points obscurs que de points G ; pour autant d'ignorance ; pour tous les autres qui n'ont rien dit, et pour moi-même qui n'ai rien demandé, il faut expier les fautes que je n'ai pas commises.
Il ne reste plus qu'à payer cette belle putain dans la vitrine, pour que je m'agenouille devant elle, dans son arrière-boutique, que je fasse reluire ses bottes-cuissardes et que je recoive le fouet.
Chacun souffre sa passion comme il peut.

Chacun souffre sa passion
comme il peut"


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commentaires

A
Mais vous êtes le seul à éclairer les "points obscurs" et, mieux encore, à les faire scintiller...
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