28 novembre 2007
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"Je suis terrorisé
par l'argent.
par l'argent.
Je suis terrorisé par l'argent. Mes rapports avec
lui sont des plus tumultueux. J'ai une peur panique à l'idée d'ouvrir l'enveloppe qui contient le relevé des mouvements bancaires. Bien souvent, pour couper court, je ne l'ouvre pas. J'ai une
angoisse après chaque paiement, aussi minime soit-il ; après un retrait -le retrait en d'autres circonstances est protecteur-. Et pourtant, je ne pense pas être radin. Que Dieu ou Diable m'en
préserve.
Pour contrecarrer la crainte de "manquer", il m'arrive de jouer les cigales et d'avoir le billet facile, mais toujours en sachant raison garder. Pour faire la nique aux empêcheurs de vivre en rond.
L'argent reste un motif anxiogène.
Du plus loin qu'il m'en souvienne, à peine et à jamais structuré (et édifié) sur l'architecture pécuniaire, je l'ai toujours vomi. Au grand désespoir de ma mère qui, en voulant me cabosser à son modèle -sur ce plan-là, en tous cas-, m'a fait tomber dans l'excès contraire. Il faur dire que mon père, rapportant ses modestes salaires, n'a jamais su actionner les cordons de la bourse, pas même en répartir judicieusement le contenu ; encore moins rédiger un chèque. Il abandonna à sa femme le soin de porter la culotte. Elle s'en acquitta non sans moultes préoccupations qui sont à la source, il me semble, de sa peur obsessionnelle d'être en manque.
Je me souviens du passage du facteur, oiseau de mauvaise augure, porteur de factures (avez-vous remarqué que l'anagramme de facteur est "facture" ?) Ma mère les ouvrait impulsivement et rentrait dans des transes indescriptibles. J'assistai impuissant au saignement à blanc de la famille !
Longtemps sans autonomie financière, j'étais un poids mort à la charge de la gestion maternelle et de la cellule de crise familiale.
Dès que j'ai pu faire bruire les premiers billets que j'avais gagnés sans tirage au sort, à la sueur de mon front, la mise en garde a été implacable : "Fais attention à l'argent ! Regarde où tu le passes ! Ne le jette pas par la fenêtre !"...
Sans aucun goût de luxe, les directives ne restèrent pas lettre (chiffre ?) morte...
Pourtant, le passage, à midi passé de l'oiseau de mauvaise augure laissa les traces de ses serres : le mauvais pli de l'assureur, ou celui du percepteur, dont j'étais le destinataire, faisaient basculer ma mère dans des transports douloureux.
Sans rouler sur l'or, mes parents n'ont jamais eu d'ardoise.
Pour contrecarrer la crainte de "manquer", il m'arrive de jouer les cigales et d'avoir le billet facile, mais toujours en sachant raison garder. Pour faire la nique aux empêcheurs de vivre en rond.
L'argent reste un motif anxiogène.
Du plus loin qu'il m'en souvienne, à peine et à jamais structuré (et édifié) sur l'architecture pécuniaire, je l'ai toujours vomi. Au grand désespoir de ma mère qui, en voulant me cabosser à son modèle -sur ce plan-là, en tous cas-, m'a fait tomber dans l'excès contraire. Il faur dire que mon père, rapportant ses modestes salaires, n'a jamais su actionner les cordons de la bourse, pas même en répartir judicieusement le contenu ; encore moins rédiger un chèque. Il abandonna à sa femme le soin de porter la culotte. Elle s'en acquitta non sans moultes préoccupations qui sont à la source, il me semble, de sa peur obsessionnelle d'être en manque.
Je me souviens du passage du facteur, oiseau de mauvaise augure, porteur de factures (avez-vous remarqué que l'anagramme de facteur est "facture" ?) Ma mère les ouvrait impulsivement et rentrait dans des transes indescriptibles. J'assistai impuissant au saignement à blanc de la famille !
Longtemps sans autonomie financière, j'étais un poids mort à la charge de la gestion maternelle et de la cellule de crise familiale.
Dès que j'ai pu faire bruire les premiers billets que j'avais gagnés sans tirage au sort, à la sueur de mon front, la mise en garde a été implacable : "Fais attention à l'argent ! Regarde où tu le passes ! Ne le jette pas par la fenêtre !"...
Sans aucun goût de luxe, les directives ne restèrent pas lettre (chiffre ?) morte...
Pourtant, le passage, à midi passé de l'oiseau de mauvaise augure laissa les traces de ses serres : le mauvais pli de l'assureur, ou celui du percepteur, dont j'étais le destinataire, faisaient basculer ma mère dans des transports douloureux.
Sans rouler sur l'or, mes parents n'ont jamais eu d'ardoise.
On se souvient de ma difficile intégration dans la vie sociale et professionnelle.
Chômeur, RMIste de la première heure, mes revenus riment avec menus. Je n'ai pas un sou vaillant. Ma mère puise dans son escarcelle pour parrainer l'achat d'un dentifrice ou d'un
pull-over.
Au fur et à mesure que mon bas de laine s'alourdit un peu, aux périodes bénies de
travail, ma mère pointe un index réprobateur sur les achats que je hasarde : un journal et un crayon. C'est un journal et un crayon de trop ! D'où que je revienne, j'entends cet écho qui
résonne et m'assourdit : "Combien tu as payé ?" Je ne garde pas le souvenir d'un seul repas où, entre le pilchard aux oignons et le roquefort, n'ait pas été abordé le thème bassement
matérialiste de l'argent : l'argent brillait par son absence et les absents ont toujours tort.
L'argent brillait
par son absence
et les absents
ont toujours tort."
par son absence
et les absents
ont toujours tort."
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Brèves :
LA DISPARITION
Pas facile, non, vraiment, pas facile de composer un texte sans "e", à la manière de mon ami Georges Pérec, que j'ai très bien connu.
Et quand on supprime les "e", qui sont de véritables juridictions de proximité, voilà ce que ça donne :
"Ah, Rachida ! C.A. d'ac ; T.I. tri ! Tir ! Rachida dit : "chat ici ira "dard-dard" à dada.
Car Rachida, D.R.H. tact tari, traita ici, hâta hard.
Ca tardait, ça ?
Cri hardi ! car Rita ira ric-rac hair ta cata."
Jo.l Faur.
_____
EXCLUSIF !
"A-propos-de-bottes.over-blog.fr" vendredi 30 novembre dans les colonnes de "Libération"
Brèves :
LA DISPARITION
Pas facile, non, vraiment, pas facile de composer un texte sans "e", à la manière de mon ami Georges Pérec, que j'ai très bien connu.
Et quand on supprime les "e", qui sont de véritables juridictions de proximité, voilà ce que ça donne :
"Ah, Rachida ! C.A. d'ac ; T.I. tri ! Tir ! Rachida dit : "chat ici ira "dard-dard" à dada.
Car Rachida, D.R.H. tact tari, traita ici, hâta hard.
Ca tardait, ça ?
Cri hardi ! car Rita ira ric-rac hair ta cata."
Jo.l Faur.
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EXCLUSIF !
"A-propos-de-bottes.over-blog.fr" vendredi 30 novembre dans les colonnes de "Libération"