18 janvier 2008 5 18 /01 /janvier /2008 13:48

Le personnage tout rouge : Les mots de mon silence seront-ils... assez... forts... pour...
(Il se tait.
Silence.
Au bout de quelques instants, tous ceux qui avaient quitté la scène reviennent.)

Le chef du bureau des fêtes terminées : (Il désigne le public.) Rien de cassé ? Qu'est-ce que vous leur avez dit ?

Le personnage tout rouge : Je leur ai dit que certains soirs, ça passait de justesse. On se demande comment se débrouille le lendemain pour arriver. Je leur ai dit que quand ils avaient froid, moi, j'avais très froid ; quand ils avaient peur, moi, j'avais très peur. Je leur ai dit que ça me ferait beaucoup de peine de savoir que j'ai pu faire du mal à quelqu'un, mais que ça m'en faisait encore plus de savoir qu'on puisse penser que j'en ai fait. Je pense que j'ai été de bonne foi. J'ai joué à quitte ou doux. Je leur ai dit plein d'autres choses mais je ne sais pas s'ils ont entendu. Et vous, qu'est-ce que vous avez fait ?

Le chef du bureau des fêtes terminées : Nous sommes allés un peu plus loin, sur l'aire tant ventée qu'elle en est mensongère. Rien de notable n'est à rapporter si ce n'est une idée singulière qui nous a traversés à tous au même instant. Alors que nous avions le vent en pourpre, nous nous sommes dit qu'un jour ou l'autre, tout le monde pouvait devenir un peu rouge.

Le personnage tout rouge : Il ne faut pas que ça s'étende, voilà tout. Vous m'avez dit à quoi vous avez fait penser le vent : merci. Mais voulez-vous maintenant me dire si, en le humant, il vous a apporté une odeur de tombe fraîche ?

Le chef du bureau des fêtes terminées : Qu'est-ce que vous entendez par-là ? Ah, oui... bien sûr, une odeur de tombe fraîche... C'est une idée que nous aurions dû creuser. Non... Non... Vous avez senti quelque chose, vous autres ?
(Les autres secouent la tête, en signe de négation.)

Le personnage tout rouge : Quelle catastrophe ! Quelle catastrophe d'ignorer s'il y en a eu une et s'il va y en avoir d'autres... Firmament et Barbe-à-papa m'en ont tellement fait miroiter que j'en vois partout. Firmament et Barbe-à-papa avaient aussi coutume de me dire : "Tu ne feras jamais rien de bon dans ta vie", avec une variante : "Toi, si tu fais quelque chose de bon dans ta vie, j'irais le dire loin." Ils n'ont pas eu à se déplacer ! Ils disaient aussi : "Tu vas mal finir", mais ils oubliaient de dire que l'on m'avait très mal tout fait commencer. Firmament et Barbe-à-papa m'ont tant dit : "Ne fais pas ceci, ne fais pas cela" qu'aujourd'hui, je suis incapable de faire quoi que ce soit. Ils ont eu les mots qui tuent. Ai-je pu tuer pour des mots ?

Le chef du bureau des fêtes terminées : Et vos barbe-à-parents sont morts ?

Le personnage tout rouge : De mort naturelle, oui.
(Un doute semble l'assaillir.
Il se tait, baisse la tête et se retourne de trois-quarts.)

(A suivre.)

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