5 février 2008 2 05 /02 /février /2008 13:04

Le fabricant de bottes qui dépassent le genou : Je m'en fous et je m'en contrefous, moi, de vos charades à la va-comme-je-te-pousse. Et puisque vous ne voulez pas me dire comment vous avez su qui je suis, et bien, moi, je ne vous dirais pas qui vous êtes. Et je vous laisse tomber à l'eau, dans cette flaque qui, soit dit en passant, sent fort mauvais. Oui, elle pue, cette flaque. Vous aurez beau l'enjoliver de toutes les joliesses de notre langage, vous ne l'empêcherez pas de puer, monsieur. Elle pue, cette flaque. C'est une honte de laisser puer une flaque un jour de Pâques. 

(Il s'en va sur cette dernière réplique, courroucé, après avoir vigoureusement serré la main de la chroniqueuse et du peseur d'eau.)

Le peseur d'eau : Je m'apprêtais à attendre le "moment où je m'y attends le moins". Le voici et je ne m'y attendais pas. Vous non plus. Il nous l'a bien fait sentir, ce type. Ce type est arrivé sur ces entrefaites de Pâques et de Noël où l'on prend encore le temps de s'écrire pour nous empêcher de le faire. Alors ?
(La chroniqueuse tend sa main, paume ouverte ;
le peseur d'eau fourrage dans ses poches, à la recherche du stylo.
Abandonnant ses recherches :)
Je pense à une chose : quand vous avez serré la main du marchand de parapluies, tout-à-l'heure, comment vous l'a-t-il serrée ? Fortement ? Très fortement ? Ne sais pas ? Sans opinion ?

La chroniqueuse : Très fortement. A m'en briser les phalanges.

Le peseur d'eau : Alors, maintenant, je sais. Ca ne fait plus aucun doute. Lorsqu'il vous a serré la main, ce que j'y avais écrit, s'est, au cours de la pression exercée, imprimé sur la sienne.

La chroniqueuse : Après avoir serré la mienne, il a serré la vôtre. Assurez-vous donc qu'il ne vous a rien transmis. Moi, je n'ai rien.
(Le peseur d'eau examine ses mains, mais rien n'y apparaît.)

Le peseur d'eau : Moi non plus. Mais j'ai aussi serré la main du fabricant de bottes qui dépassent le genou. Il faut coûte que coûte le retrouver. Il ne doit pas être bien loin. Surveillez les canards. Il faut faire vitement.

(Le peseur d'eau s'approche de la balustrade et regarde au loin.)  

La chroniqueuse : Vous voyez quelqu'un ?

le peseur d'eau : Ce que je vois est beau.

La chroniqueuse : Alors, ça ne peut pas être quelqu'un.

Le peseur d'eau : Je vois un pré pentu et herbu. En contrebas, un ru dessine un coude au milieu de cognassiers. Deux gués en assurent le passage à pieds presque secs.
(La chronqueuse s'agite subitement. Elle tend ses deux bras, un peu comme pour former une barrière à on ne sait quoi. 
Le peseur d'eau se retourne et revient près d'elle.)
Que se passe-t-il ?

La choniqueuse : Les canards veulent s'enfuir. Aidez-moi. Ils ont commencé à s'ébrouer quand vous avez parlé du ru.

(Le peseur d'eau se place en face de la chroniqueuse ; tous deux se tiennent par les mains, cernant la flaque, et se mettant à tourner autour, les pieds écartés, semblant danser une danse ridicule.)

(A suivre.)




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