"La tyrannie du minuscule."
Il serait prétentieux de dire que je détiens le monopole de la souffrance. Mais ce ne serait pas rendre justice de prouver que je ne
m'en approche pas.
10 ans, 15 ans, 20 ans de TOC tous azimuts. Je suis vérificateur, ruminateur, accumulateur et procrastinateur. Les TOC majeurs ont leurs pricipaux foyers : Sexe, Sida et Solitude. Les trois
"S".
Les TOC mineurs sont plus "indécelables" et indicibles. Je pourrai nommer la difficulté "la tyrannie du minuscule". Où l'angoisse va-t-elle se nicher ? Dans des détails infiniment petits : une
goutte, une peluche sur un vêtement, un point blanc, noir, rouge, un cheveu, un poil, une miette, un atome, un point sur un "i", une barre sur un "t", toutes, tous férocement contaminés... Ca
n'arrête pas. Et c'est plus fort que moi. Oui, ça va se nicher partout ; ça se reproduit souvent.
Un séquencage rapide peut balayer l'éventail et tenter de faire comprendre :
- refermer la boîte de pulvérisé-chocolat au petit déjeûner : difficile ;
- nettoyer un surface : difficile ;
- se peigner : difficile ;
- rincer un verre : difficile ;
- lire, refermer un livre, un journal : difficile ;
- écrire : difficile ;
- s'égoutter le pénis : difficile ;
- penser : difficile.
Depuis longtemps, je n'existe que par l'identité des TOC. On me le reproche souvent. "Tu en parles trop ! Tu les entretiens ! Tu ne peux pas t'en détacher ?" Et non ! Excusez-moi, je ne
peux pas m'en détacher.Ca ne vous quitte pas. Un psychiatre a dit à une amie : "Fauré a besoin de ses TOC pour écrire." Je pense qu'il a tort. J'ai engrangé suffisamment de matière pour
créer sans ça.
Il serait encore intéressant de dresser la carte des impacts obsessionnels et compulsifs d'une journée, ainsi qu'il est pratiqué avec les impacts de foudre, ou sur les plans d'une zone à risques
de séismes. Je redoute toujours autant tous ces gestes répétés à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en
éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête, à s'en éclater la tête...
Les TOC "à grande échelle" ne sont pas mieux vivables. Ils s'appréhendent dans la durée et la distance. Dur de prendre une décision qui serait préjudiciable. Dur d'envisager un changement de mode
de vie. Ainsi changer d'appartement, où j'ai honte de faire entrer quelqu'un, ne serait pas un luxe.
Les TOC annihilent des vies.