"Dans les petits papiers."
Je viens de retrouver un papier sur lequel j'ai écrit :
"Je suis un enfant non-désiré. J'ai 37 ans (écrit en 1999). Je n'ai pas coupé le cordon ombilical. Ma mère m'a couvé, hyperprotégé, infantilisé.
En voulant me faire beaucoup de bien, elle m'a fait beaucoup de mal. Elle m'a gardé en otage. Elle a dicté toutes mes décisions, fait infléchir toutes mes propositions ; elle a exercé et maintenu
une étouffante pression.
Elle a créé une dépendance financière.
Elle m'a transmis tout son stress.
Je n'ai jamais pu acquérir une autonomie ; encore moins une indépendance.
Elle ne m'a pas vu grandir et je ne l'ai pas vu vieillir.
Aujourd'hui, je mesure l'ampleur des dégâts.
J'ai passé le plus clair de mon temps auprès de ma mère ; tout me ramène à elle.
Je nourris pour elle un véritable rapport amour/haine.
Indépendamment de cette éducation très protégée, je souffre d'une anomalie génitale (phimosis mal soigné) qui m'empêche d'avoir des rapports sexuels.
Les femmes me font peur.
Je me sens très seul et j'éprouve de très grosses angoisses."
Je viens de retrouver quelques phrases de Franz Kafka, extraites de sa correspondance, en 1920 :
"J'écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je devrais penser, et ainsi jusqu'au plus profond de l'obscurité."
Je viens de retrouver la copie d'une lettre que j'ai adressé au "Courrier" du quotidien régional "La Dépêche du Midi". Elle est datée du 11 septembre 2000 et dit ceci :
"J'ai été élevé dans un milieu figé et étriqué où la sexualité était un sujet tabou, occultée par de nombreux non-dits et interdits.
Mon père fut insignifiant et ma mère très possessive.
A 10 ans, j'ai subi une circoncision pour remédier à un phimosis. Ce fut un magistral loupé.
Pendant 20 ans, j'ai vécu -en me taisant- avec un sexe charcuté qui n'était pas fonctionnel.
Je n'ai jamais pu instaurer un dialogue qui aurait peut-être permis de limiter l'ampleur des dégâts.
En 1994, j'ai accepté de subir une intervention réparatrice, une plastie du frein.
Hélas, la frustration et la carence affective ont généré des troubles psychiques dont j'ai du mal à me défaire.
Insidieusement, une déviance s'est installée, le fétichisme (des bottes-cuissardes) à tendance sadomasochiste.
Je me sens VICTIME DE CETTE DEVIANCE QUE JE N'ASSUME PAS, qui gère, obsède et envahit tout mon système de pensée. J'alterne l'attrait et le rejet. J'éprouve un GRAND SENTIMENT DE CULPABILITE ET
DE HONTE. Du conflit fascination/répulsion naît le refoulement et l'angoisse. CE COMBAT EST EPUISANT.
Voulez-vous m'aider à y voir plus clair ?"
C'est un appel au secours que je remets aux bons soins de l'acheminement postal. Je guette une réponse dans les colonnes du journal. Ce cas de figure est-il si délicat ? La lettre s'est-elle
égarée ? Quoi d'autre encore pour que je ne trouve pas de réponse à ce douloureux questionnement ?