30 mai 2009 6 30 /05 /mai /2009 19:29

"Adieu Curé, je t'aimais bien
Adieu Curé, je t'aimais bien, tu sais
On n'était pas du même bord
On n'était pas du même chemin
Mais on cherchait le même port."

Jacques Brel (Le Moribond)

Je ne reviendrai pas sur la vie de Casy Rivière -s'il était toujours parmi nous, les églises ne se videraient pas autant- que j'ai très bien connu (Voir page du 10 juin 2007 de ce présent blog).

Casy Rivière et Jacques Brel entretenaient une amitié profonde. Ils se sont rencontrés souvent.

J'ai visité Casy, à la fin de sa vie, et c'est toujours l'âme lavée et parfumée que je prenais congé de lui. Je le revois, du haut de l'escalier, me dire : "Tu reviendras me voir, dis, tu reviendras me voir ?"
Je quittai cet homme à qui je venais de faire l'accolade, accolade qu'il avait lui-même donnée à Claudel, Montherlant, Mauriac, Kessel... J'étais l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours.

Jacques Arlet, qui a consacré une biographie à Casy Rivière ("Curé en Ariège et ami des poètes. La vie de Casy Rivière. Editions Loubatières, 1992), m'a dit regretter que  Casy Rivière, bien que grand épistolier, n'ait pas plus écrit, romans s'entend...

A sa manière, Casy Rivière, curé atypique, a construit son oeuvre. Jacques Chancel ne s'y est pas trompé. Il lui a consacré l'une de ses fameuses "Radioscopies" le 8 avril 1977. C'est au cours de cette émission qu'a été lu ce texte maginifique de Joseph Delteil, que je souhaite mettre en valeur et partager avec vous.

"Qui n'a rêvé d'un prêtre qui aurait des ailes, mais des ailes dans sa poche, et qui en réalité marcherait à pied à coté de nous la main dans la main, d'un prêtre qui porterait auréole et sacrée houlette, mais aussi qui saurait nous accueillir en sandales et les yeux clos, et nous offrir le sel et le miel les plus terrestres, quand nous rentrons au bercail peut-être une épine en travers de la gorge et la tête basse, et que ruisselle sur nous je ne sais quelle grâce plus bénite que toutes les eaux bénites, plus physique et métaphysique. Quand j'ai connu l'abbé Casy Rivière, il m'a semblé trouver le prêtre absolu. Ce que j'ai senti d'emblée dans mon âme et comme un rare événement, c'est la fraternelle confiance, la sainte foi, la communion. J'ai su, par illumination que, lui, avait choisi entre la lettre et l'esprit. Qu'importe la pieuse formule bureaucratique, le formalisme de la parole et de l'encre quand il s'agit des choses du coeur. C'est la bataille entre le brave scribe, prisonnier du texte, et le libre héros de l'aventure et de l'amour. L'abbé Casy Rivière à mes yeux a toujours fait fi des apparences, et des menues prescriptions de la Sacrée Congrégation des Rites, pour courir droit au but, c'est-à-dire au salut. A grands pas. Ce n'est pas une étiquette que l'homme de Dieu mais un homme complet avec tous ses apanages. Ce n'est pas un simple numéro de la liste mais un tempérament authentique avec des épaules de quoi nous faire la faire la courte-échelle d'ici bas au très haut paradis (les couleurs de la gorge présagent les couleurs du Ciel), avec escale s'il y a lieu dans les jardins de l'art et de la pensée. Mais soyez sûr que si l'abbé Casy a eu le privilège de fréquenter des hommes comme le grand Claudel, Jacques Brel et Montherlant, c'est pour en butiner les valeurs et en enrichir son étendard. J'aime la joue joufflue et le pas astral quand il s'agit d'escalader les commandements de Dieu Et la main la plus tendre pour bercer les misères et les infortunes humaines."

Joseph Delteil
http://josephdelteil.net

PS : "Qu'importe la pieuse formule bureaucratique, le formalisme de la parole et de l'encre quand il s'agit des choses du coeur" : cette phrase est toujours accrochée en évidence près de mon bureau, et là où je travaille, elle prend tout son sens...


Fac-similé de la couverture du livre de Jacques Arlet.

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commentaires

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Un merci infini pour ce "partage"...
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