30 juillet 2007 1 30 /07 /juillet /2007 19:26
CAMILLE AU PORTUGAL

Je me surprends à écrire "Camille au Portugal" parce que je pense à "Poly au Portugal". Certains doivent se souvenir de ce petit poney célèbre et intelligent, crée par Cécile Aubry, et dont les aventures ont bercé l'imaginaire des gens de mon âge.
Je garde donc le titre... Pour les nostalgiques. Pour les autres, voir  l'encyclopédie "Wikipédia"..., il doit certainement y avoir une note...

Camille tient son journal de bord, sa feuille de route. Je ne me fais donc aucun tracas en ce qui concerne son odyssée littéraire.
C'est curieux comme j'ai l'impression d'être en vacances auprès d'elle, alors que je suis resté au port pour mettre en radoub mon navire...
A la rentrée, m'est avis que vous aurez droit à un blog de Camille... "Quelque chose d'elle..."


Aujourd'hui. 17 heures. Mon télephone sonne. Je décroche. De la grande musique me parvient dans l'oreille. J'écoute avec ravissement. Je crois savoir d'où ça vient ; ça n'a pas la férocité de la vente par prospection et matraquage. Je vais jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'à des applaudissements nourris. Et mon téléphone fait "bip bip". Y'a rien à vendre.
Camille me rappelle. Elle se trouve au Paradis d'où elle m'a fait partager un "Avé Maria".
En fait, elle se trouve au monastère de Alcobaça, où, tenez-vous bien, l'on ramena la dépouille d'Inès de Castra, reine de beauté, belle au col de cygne, décapitée parce qu'elle avait été adultère...
Une fois morte, le roi du Portugal ordonna à tous ses sujets, fidèles et adultérins sans distinction, de venir baiser la main de cette tête couronnée...
Mon grand ami Henry de Montherlant s'en est inspiré pour écrire une petite pièce, "La Reine Morte", oh, trois fois rien, une petite bagatelle jouée à la Comédie Française avec Madeleine Renaud...




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30 juillet 2007 1 30 /07 /juillet /2007 11:59
Le Tarn.
n. m. Rivière du Sud de la France, née au Sud du mont Lozère, afflluent de la Garonne (rive droite) ; 375 km ; bassin de 12 000 km². Il traverse les Grands Causses en de pittoresque canons (gorges du Tarn), passe à Millau, Albi et Montauban, Buzet-sur-Tarn et Bessières.

Quand Maurice fabriquait des bottes avec de vieilles bouillottes.
Maurice Baudou avait racheté une vieille centrale hydraulique au bord du Tarn, à Bessières, pour faire tourner une usine qui régénérait du caoutchouc. Celui dont on fait les bottes...
Chez Baudou : on y accédait par le "Chemin de Douce Dame", qu'empruntaient aussi les gros camions ventrus, ceints de leurs lourdes bâches, transportant dans leurs flancs des déchets de caoutchouc. A pleines bennes, vieilles bouillottes et autres chambres à air "surrustinées" débarquaient aussi en gare de Bessières, et étaient acheminées vers la manufacture. Là, elles vivaient un purgatoire sans appel. L'opération donnait à la bonne ville de Bessières, les jours d'autan, un exotique parfum d'hévéa. Sans autre forme de procès, les vieux ustensiles étaient réduits en poudre. Comme disait le Duc d'Elboeuf : "C'est avec du vieux qu'on fait du neuf." Rien ne se perd ; tout se transforme.
Mixée au granulateur, sortie des fours à haute pression, puis remise aux calandres Bessièraines, la matière première -sous forme de plaques ressemblantes à des cakes ou des quatre-quarts- était ensuite dirigée vers le sites des "Eglisottes", près de Bordeaux. Là, le produit se déclinait en bottes, cuissardes de pêche et chaussures de travail.
A Bessières, les artisans de la métamorphose étaient tous d'ici : indigènes bon teint, pure souche. Les "Baudou" sont avant tout issus de la Terre "qui ne rapporte plus" et "puisqu'il faut bien vivre" se sont ralliés à la botte verte, et on appris l'art de la vulcanisation.
Mon père en était.
On voyait arriver à l'usine plus de vélos et de "Mobylettes" que d'autos. C'était la noria incessante des équipes qui se passaient le relais, puisque fonctionnant sur le principe des "trois-huit". Ne pas laisser s'éteindre le feu, ne pas oublier d'emporter l'odeur du caoutchouc jusque dans les draps du lit.
C'est ma mère qui était contente !

Ephémérides.
Morceaux choisis.
Le 28 janvier 1978 : acheté Carrefour 2 paires de drap 30,60 F le drap.

Quand Gustave draguait pour des châteaux de sable...
Buzet-sur-Tarn et Bessières se touchent mais ne se confondent pas. C'est entre les deux que Gustave a installé, dans le lit du Tarn, ses godets de dragage. Depuis plus de deux cents ans, dans la famille Doumerc, on s'explique comment il faut draguer de père en fils.
Combien de murs, de fondations, de façades crépies de la région doivents aux "Sables et Graviers Doumerc" leur bonne tenue ? Les camions-bennes aux bonnes joues et bonnes ridelles ont fait leur trou dans le Bessiérain.
Gustave a perdu sa femme. Il vit seul en compagnie de sa soeur, "Mané", paralysée.
Ma mère rentrera à leur service, en qualité d'employée de maison. Elle fera les tâches domestiques, lavera, brossera, nettoiera, cuisinera, ravaudera... Ma bonne mère. Ma mère bonne. Mieux que les artistes en vue, elle fera des "ménages" dans les chaumières, mieux que des stars qui, pour gagner toujours plus, crachent dans des micros, dans des supermarchés de dupes.
A marquer d'un gravier blanc, maman va aussi donner la main à Bernadette, la fille de Gustave, dans sa belle maison, près des lacs. Maman m'y emmène parfois. Bernadette est d'accord. Elle m'aime bien. Le fils de Bernadette, qui commence à peine à parler, connaît la dame qui vient s'occuper du ménage : c'est madame Fauré. Il entend "Fauré", mais il a bien le temps d'être grand et, tant qu'il peut, il a raison de gagner du temps. C'est la dernière syllabe qui le marque. Madame Fauré, il l'appelle "Vé".

"Vé"
Du coup, même Gustave s'y met : il appellera affectueusement ma bonne mère "Vé"; Bonne mère. Ma mère est bonne. Vé ! Comme dans un film de Pagnol...

(A suivre...)

Joël Fauré


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29 juillet 2007 7 29 /07 /juillet /2007 15:46

img077.jpg
"Mon regard fut littéralement happé par un "Livre de Poche". Je fus irradié.
Cette jeune femme brune. Ce haut de cuissardes, cette plage de peau jusqu'aux côtes de chemisier aux motifs fleuris me troublèrent à vie."
La femme de ma vie (Joël Fauré)

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29 juillet 2007 7 29 /07 /juillet /2007 11:40
Ma mère découpait dans les journaux toutes les recettes, sauf celle du bonheur.

"Qu'est-ce que tu as mangé, à midi ?"
Nos conversations ne volaient pas très haut. C'est dommage. Elles auraient pu. Elles étaient ouvertes, ponctués, et essentiellement nourries par ce leitmotiv, quand je rentrai de la cantine ; puis, un peu plus tard, du restaurant d'entreprise ; et puis, un peu plus tard, quand je l'appelai de la clinique psychiatrique : "Qu'est-ce que tu as mangé, à midi ?"

"Combien tu as payé ?"
Oui, nos conversations étaient limitées. Elles étaient régentées par cette phrase monnaie-échange : "Combien tu as payé ?", et qui résonne encore en ma mémoire de la plus terrifiante des façons...

Ma mère avait le ticket...
avec tous les chauffeurs de car qui menaient à Toulouse. Il suffisait qu'elle l'achète. Lorsque nous allions à Toulouse, c'était une véritable expédition. Il fallait d'abord se résoudre à abandonner la Maison Grise, à cheval sur la tout aussi grise Mobylette, puis gagner la Grand'Route. La 88. La Nationale ! Nous laissions la grise sous le hangar de la ferme "Ravary". Et nous attendions, à la halte de Roquesérière. Nous attendions un peu Godot et beaucoup le car...

Un Livre de Poche aux "Nouvelles Galeries".
C'était dans les Grands Magasins Toulousains, aux "Nouvelles Galeries", je crois. Au dernier étage. A Toulouse, les "Nouvelles Galeries" sont nouvelles depuis déjà longtemps. J'étais avec ma mère. Mon regard fut littéralement happé par un "Livre de Poche", bien en vue sur un rayonnage. Je fus irradié. Cette jeune femme brune. Ce haut de cuissardes surtout, cette plage de peau jusqu'aux côtes du chemisier aux motifs fleuris me troublèrent à vie. J'achetai le livre, comme d'autres achètent des madeleines...
Ma mère décela-t-elle mon émoi ? Evalua-t-elle la valeur, la portée et de sens de cet achat ? Nous sommes remontés dans le car pour regagner l'accablante ruralité.

Si j'étais rédacteur en chef du magazine "A propos de Bottes"(tirage moyen : 170 000 exemplaires), voici quel serait l'éditorial du numéro à venir :
"Il fallait bien que ça arrive un jour. Il fallait bien que nous nous heurtions, lui et moi, à un problème de taille : le sexe voulait parler en même temps que le cerveau.
Et la pensée, prisonnière et métastasée, en était toute bouleversée.
Entre le nerf et le microbe, pour quelle atteinte fatale croyez-vous qu'elle opta ?
Gagné ! Pour le microbe. Moins de peine à supporter la douleur.
Et nous allâmes nous masturber.
Quinze secondes de plaisir et d'infidélité pour quarante-quatre ans de dévotion à la Vierge Marie. Piéta et Mater Dolorosa.
Alors, coulèrent des larmes rentrées, mais pas là où il le fallait. Des cristaux et des paillettes d'argent face à un mystère rouge.
Contaminés nous fûmes. La contagion n'a pas de frontière.
Et les belles images que nous montrait une -notre- mère jouèrent sur un double tableau : il ne fallait surtout pas toucher les bottes de la Sainte, et pourtant, il fallait l'honorer. Impossible à faire. Ca revient à ne pas cliquer sur les icônes des ordinateurs.
Le jeu social est un jeu érotique.
Nous sommes partis jouer...
Il fallait bien que ça arrive un jour.

"Tu n'as qu'à te branler."
Où sont les parfums de mon enfance ?
Où sont mes savoirs purs ?
Mes savoirs purs d'avant de savoir. Qu'il "y a des corps, et pis encore, des sexes. (1)
"Tu n'as qu'à te branler" m'a lancé un jour ma mère, sans méchanceté sans doute, un jour où je lui reprochai de m'avoir tenu à l'écart des choses du sexe, et où je me plaignais de ma difficulté à approcher les filles. "Aux bêtes, on leur apprend pas" a-t-elle rajouté.

(1) "L'avenir dure longtemps" (Louis Althusser) - Stock

(A suivre)

Joël Fauré


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28 juillet 2007 6 28 /07 /juillet /2007 20:40
UN VELO ET UNE VOITURE... D'APPARTEMENT

C'était contre toute attente...
Toulouse. Un samedi soir de juillet. Le dernier samedi soir de juillet.
J'avais dans le crâne l'idée d'acheter une cravache... ou deux dictionnaires, "Le Larousse" et "Le Robert", dans leurs dernières éditions...
J'avais réussi dans l'après-midi une petite vidéo de mon éjaculation en gros plan. Camille était loin ; je me languissais...
J'avais nourri mon "journal extime" et dormi comme il faut pour un homme de mon âge, de ma condition et de ma santé...
Je suis sorti d'intra-muros.
Là où je suis allé, c'est une "grande surface". Mais vraiment grande. Les Toulousains n'hésitent pas à dire que c'est l'une des plus grandes d'Europe...
Aussi surréaliste que cela puisse paraître, moi qui ai passé plus de temps dans les librairies que sur les stades (question d'aisance ? "Ah bon, ça se voit ?"), je suis entré dans un magasin dédié au sport...
Je l'ai dit, je voulais, désirais, par caprice ou par "physiologie", une cravache. Et je savais qu'il y avait là un rayon équitation.
Le désir d'achat était diffus, confus ; j'étais déjà passé par ce stade plusieurs fois au cours de ma vie, quand j'ai fabriqué mon premier fouet avec un tuyau d'arrosage, quand j'ai acheté un fouet de chien en supermarché (et que je l'ai  ensuite donné à une dompteuse du cirque Amar !), quand j'ai acheté en sex-shop ce grand fouet qui a fouetté une star de la chanson...
Bref.
Bref, là, sur quoi je tombe ? Sur une vélo d'appartement. Il me plaît. Il me tente. Il y a un écran et tout plein d'écritures... "Vous pouvez l'essayer si vous voulez" me dit un vendeur bavard. Je l'essaie. Des chiffres bougent sur l'écran... Il y a des petits coeurs dessinés en rouge. Je ferai bien de m'occuper du mien. Le docteur me l'a dit avant-hier : "Vous n'avez que 44 ans !" Et sous-entendu : "N'oubliez pas que vous avez aussi un corps."
Bon, tant que j'y suis, je vais voir les cravaches...
Il y en des bleues, des rouges, des violettes... Elles sont si jolies...
Et soldées aussi : 4 € 99. J'ai presque envie d'en acheter 4 ou 5 pour en faire un bouquet. Une "nature morte".
Je sors de "Go Sport" sans rien.
Et je rentre dans la surface. C'est vrai qu'elle est grande.
Rayon dicos (A ce propos, je regrette ceux qui étaient en or, et que faisait briller Bernard Pivot, le samedi après-midi), je vois des palettes entières de "Petit Larousse 2008", et à côté sur une mauvaise gondole gondolée où des clients ont "oublié" une paire de tongs et un dentifrice "Le Petit Robert". J'ai l'impression d'entendre dans les hauts-parleurs une voix dire : "Le Petit Robert est perdu. Ses parents sont priés de venir le chercher au rayon scolaire".
Dans le "Petit Larousse illustré 2008" fraîchement imprimé, je m'assure que le tsar "Nicolas Ier de Sarkozye" est bien Président de la République. Hélas, oui.
Aurons-nous ensuite à faire avec une dynastie de "Louis" ?)

"T.O.C."
y est.
"Cuissardes" aussi.
"Brel" aussi.
C'est écrit.
C'est bon, une année peut recommencer...

Mais 30 euros le "Petit Larousse" et 60 euros le "Petit Robert", je prends pas. C'est pas donné, la culture.
Je repense au vélo.

Finalement, en fouinant par hasard, j'ai acheté... une voiture.
Une "4L". Miniature. Echelle 1/43e (Un mois pour 43 ans ?). A un prix magique :
2 € 99. Ca me rappelle tellement de choses...
Les souvenirs n'ont pas de prix.

Joël Fauré


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28 juillet 2007 6 28 /07 /juillet /2007 11:01
Suzanne Labranque.
Depuis quand l'idée d'écrire un livre sur ma mère, avec un détour par ma maîtresse d'école me poursuit-elle, plus assidûment que je ne fus auprès d'elle, plus "drument", plus inversement proportionnel que je n'en eusse pas du tout eu envie d'en parler, alors qu'il aurait fallu, quand j'avais huit ans ? Que la vie est drôle et bête...
A peine me jurai-je pour moi-même de me distraire de cette idée trop courue, à grandes lampées de mémoire déboulaient leurs silhouettes et leurs voix. Proust venait de quitter la pièce et me venir visiter, en passant par là, et la vie, avec tous ses accessoires, ne cessait de faire reculer -avec quel danger fatal- les instants des premières années soixante-dix où mon école était bâtie d'impatience et de sueur angoissée. Quel texte sera écrit pour elles, au bureau où je suis ? Je n'ai aucun droit à l'erreur. Je n'ai que le droit d'être le premier de la classe.
Ma maîtresse d'école, Suzanne Labranque, ne devra pas corriger en rouge cet exemplaire. Les imprimeurs, aussi, n'auront qu'à bien se tenir.
Mais après, avec quels mots choisis, et quels mots écartés, dire, en une combinaison absolue, leurs valeurs de mère et de maîtresse tout aussi absolues et définitives, leur déterminisme, leurs qualités et leurs défauts ?
Il n'est pas séant de donner l'âge d'une femme sauf celui d'une mère (21 novembre 1927) et d'une maîtresse d'école (5 février 1930) pour qui la lettre et le chiffre sont les fondations du Savoir...
O oui, mon Dieu, je suis agréablement dicté par le doux bercement de ma mémoire, et l'alphabet me séduit, me fait la cour, et je remercie le démiurge inspiré qui l'a inventé. Voyez "Le Livre de ma Mère" et les paragraphes sur ma maîtresse d'école que vous avez devant les yeux.
Le chiffre n'est qu'un contrepoids que je me raisonne, en chassant le garçonnet qui parfois me chahute, à qualifier d'utile.

De la classe unique du hameau des "Luquets" au groupe scolaire, en passant par l'école mixte, aussi chère à Ferry qu'à Vincent (pas Van Gogh, mais l'autre), Suzanne a allié la rigueur à l'humanité.

J'ai capturé ces petits fragments de temps, et vous les restitue, à vous qui voulez bien me suivre.
Tous les matins que Dieu ou Diable faisaient, Suzanne passait entre nous, un bloc-encreur dans une main, une petite vignette de bois dans l'autre, et elle faisait naître sur nos cahiers du jour (protège-cahier rouge) des frises de fruits et de fleurs à colorier selon le goût, l'humeur, et sans doute aussi la couche sociale plus que l'acéré de la mine.
Mais les petits enfants Jacobins de "Buzet-la-Forêt" , pétris comme de la bonne farine patriotique, fils de fils d'une des dernières grandes guerres, étaient souvent issus des meules des champs de blé : Josette était bonne en tout, Bruno se faisait tirer les cheveux, Véronique tentait sans succès d'expliquer comment on fait les enfants, et moi j'avais peur de manquer le car et d'oublier la casquette que j'avais sur la tête !
Les bottes de Suzanne, le feutre rouge qu'elle utilisait en marge -marginale, va !-, le regard vif et pénétrant sont collés à ma peau ; jes les emporterai dans ma tombe.

J'ai gardé mes cahiers d'écolier : ils sont ensanglantés d'annotations ! Le tableau synoptique de mon travail restitue une écriture racée. Il recèle des "Très souvent absent." et "Avec beaucoup d'indulgence, Joël passe en 6ème." qui me tendent un miroir incomplaisant.
Suzanne a tout fait pour me faire aimer les choses de la vie.
Son capital intellectuel est inestimable et n'est pas côté en bourse. Je lui suis plus redevable qu'à mon banquier.
Je déclare ici solennellement mon cahier de récitations (protège-cahier jaune) mieux investi de pouvoirs que ma carte professionelle, et des types comme Verlaine, Baudelaire, Gauthier et Apollinaire à qui Suzanne m'a présenté, beaucoup plus fréquentables que d'aucuns dont je tairai le nom.
Mais pas de réglement de compte.

Les compositions et les leçons de choses naturelle (SVT SVP de nos jours !) -la chenille du bombyx du mûrier ou ver à soie se transforme en papillon nocturne aux ailes duveteuses-, les conjugaisons, les tables de bois (cirées en juin) et de multiplication (sues mais tardivement), la morale, l'Instruction Civique n'ont pas tari les réservoirs, les viviers et les pépinières de la pensée mais les ont approchés de la plénitude.

J'ai beaucoup de respect pour celles et ceux qui disent : "Je ne sais pas" et veulent apprendre, connaître, toujours et toujours. Comme ma mère qui a passé son permis de conduire à cinquante-quatre ans, Suzanne a révisé son Code, presque au même âge. Quand un Ministre de la République a pondu des réformes et décrété qu'il fallait changer de place la bosse des maths, Suzanne, la maîtresse d'école est revenue à l'école des maîtresses d'école. Elle nous en revint plus savante, après avoir flirté avec des ensembles et des "patates" pour mieux nous les faire connaître, vertiges et ivresses compris.

Qui, de la main ou du gant, de l'enfant trop violent ou trop effacé, franchira demain la porte des écoles nouvelles, c'est-à-dire celles d'hier ?
Depuis que j'ai quitté l'école où je ne voulais plus aller, en me faisant porter pâle, je ne cesse de rêver que je veux y retourner !

Une lettre de Suzanne Labranque.

"Buzet, le 14 mai 1997

Mon cher Joël,
J'ai été très émue par le courrier que tu m'as adressé. Mes élèves, tu le devines, ont tenu une grande place dans mon métier de maîtresse d'école et j'ai gardé d'eux de très bons souvenirs.
Je souhaite que tu puisses te réaliser pleinement dans la voie que tu as choisie.
Assez fatiguée en ce moment, je ne peux pas répondre affirmativement à ton invitation. Toutefois, je t'en remercie et je te souhaite tout le succès que tu mérites.
Reçois, mon cher Joël, mon très affectueux souvenir.

S. Labranque

P.S. : Je suis satisfaite que tu te souviennes du "BLED" si souvent oublié ou même inconnu...

(A suivre.)


Joël Fauré



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27 juillet 2007 5 27 /07 /juillet /2007 20:47
A MES DEUX LECTRICES A et T

Par ordre d'apparition à l'écran.
A tout seigneur tout honneur.
A. A A. Pour A. Je luis dois tout. "Blogosphérement" s'entend. Faut-il dire par A ? D'A ? En A ? (Comme on dit "en Arles" ou "en Avignon", mais curieusement pas "en Albi."...)
Si elle a choisi le prénom d'une héroïne de Michel Leiris, elle aurait tout aussi bien pu choisir celui de "A" tout court, dans l'indispensable roman de Jean d'Ormesson "La Douane de Mer"
D'A, j'aurai mille choses à écrire. Je ne sais pourquoi. J'y reviendrai. Je lui consacrerai un portrait.

T. Comme "Thérèse Desqueyroux" de François Mauriac. Comme Toulouse-Lautrec. Comme Tristan Derême. Comme "Tristan et Tisot".
Je ne sais rien de T, si ce n'est qu'elle plante des tulipes, qu'elle mange des clowns et qu'elle boit aux cascades de rires. Mais ça ne me suffit pas.

De A et de T, qui sont désormais mes lectrices soumises à ma botte, je veux savoir plus.
Je veux qu'elles me disent leur date de naissance, leur lieu de naissance, leur profession, leur groupe sanguin, la date de leur premier flirt, leurs antécedents médicaux ; je veux savoir si elles fument, si elles boivent, si elles se droguent, si elles sont tatouées et où, si elles sont perçées et ou ;
je souhaite connaître leur domicile, leurs mensurations, la couleur de leurs yeux, de leurs cheveux, leur numéro de téléphone, la liste des prénoms des hommes qui ont compté, qui comptent et qui compteront dans leur vie... et toute autre information qu'elles jugeront utile de me communiquer...

C'est pour la dédicace, vous comprennez ?

J

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27 juillet 2007 5 27 /07 /juillet /2007 15:59
LE 5e épisode de "LA FEMME DE MA VIE", écrit mais égaré dans des méandres  insondables.
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27 juillet 2007 5 27 /07 /juillet /2007 14:53
La droguerie de Bessières.
Fallait être gonflé pour une boutique de s'appeler comme ça : "Droguerie". Regardez sur Internet aujourd'hui... Une boutique de drogue ! Je revois l'enseigne : lettres de bois jaunes collées sur des lattes de bois vernis. L'odeur de l'intérieur me revient. M'enivre. Me drogue. Je retrouve, en les convoquant, les regards et les voix atones des marchands. Le père, lubrique ; drogué. La mère, apathique ; droguée. Le fils, tout blanc, devenu comptable ; drogué. La Belle-Fille, toute rouge ; droguée. Ce qu'il reste de la famille va se reconnaître. Tant pis. Il ne me fera pas de procès puisque je ne cite pas de nom.
Ma mère allait y acheter ses drogues : berlingots de Javel, essence de térébenthine... Moi, je reluquais les miennes : des martinets. Parce que j'avais d'autres chats à fouetter.

En sortant de l'école.
Un souvenir ramène à la mémoire du garçonnet que je fus quelque chose de très beau et grandiose : sa vie d'écolier et sa bonne vieille école.
Mais, dire les sensations anciennes, les réminiscences encore, sans utiliser les mots du thème : le cuir du cartable, la craie du tableau, etc... relève de l'exercice de haut vol.
Or, l'école de "Buzet-la-Forêt", ses tuiles, ses briques, son fénestrage en veulent tout autrement, et imposent encore une dictée. Il ne serait pas légitime de s'y soustraire.
Les divisions à virgule et l'ardeur imbécile que mettait le garçonnet à ne pas savoir les résoudre ; les tables de multiplication auxquelles il ne sut jamais s'accouder l'ont à jamais condamné à être quelqu'un "qui ne compte pas".
En revanche, il se souvient des jolies phrases élaborées par Odette et Edouard Bled, éponymes de ce livre-culte qui a élevé bien des élèves.
Depuis, le "Bled" est paumé.
Tout comme les manuels de lecture au motif écossais rouge ou vert, seuls détails rescapés de la transe. Malgré tout, des mots et des formules s'imprimaient dans son cortex d'enfant primaire et sauvage.
Il savait qu'il le resterait.
De la salle des classes, des jours de long cours, subsistent quelques images et quelques cartes-maîtresses. Une maîtresse, ça laisse des traces.
Sur son bureau, il y avait des serre-livres. C'étaient des biches. Ou des éléphants. Non, des biches. Porte-cartes-murales et porte-plumes, tampons-encreurs, jouets tracteurs en plastique, et vous, les biches, dans quelle brocante dormez-vous ? Et au moins, dormez-vous ? Et vous le "Bled" paumé que vainement recherche le garçonnet, que devenez-vous ?
La casquette qu'on lui faisait porter vissée sur le crâne, il se hasardait dans la cour, du bac à sable au dépôt à charbon, de la rigole rouge charriant des emballages de "La Pie qui Chante", au muret protégeant les bicyclettes.
Posée là, une grosse vasque que le petit garçon a toujours vue vide de sens et de primevères. Il y avait aussi une grosse racine d'acacia. Ou de marronnier. Non, c'était un acacia qui avait mangé le goudron et qui servait de promontoire, d'estrade et d'île déserte.
Plus loin, sur l'esplanade, les feuilles d'automne conjuguaient les verbes des poètes : tomber, tournoyer, tourbillonner au présent de l'indicatif et à la forme active. (Voir "Bled") Et ces mêmes bonnes feuilles, envoyées par ces mêmes poètes, invités à Buzet et généreux de vent, parlaient d'elles comme jamais elles n'auraient dû cesser de le faire.
"Voilà la feuille sans sève qui tombe sur le gazon. Voilà le vent qui s'élève et gémit dans le vallon." (Lamartine)
"Les fruits tombant sans qu'on les cueille, le vent et la forêt qui pleurent toutes leurs larmes en automne, feuille à feuille." (Guillaume Apollinaire)
Et j'ai cueilli, en passant, à l'automne qui dort le bouquet des trois feuilles d'or." (Henri de Régnier)

Sous les armoiries de la ville -une buse essorant d'or becquetant une branche sur une terrasse de sinople-, Monsieur Vincent-de-Paul est saintement resté dans sa niche. Sur son coeur, il porte un petit enfant. De sa main dextre, il caresse une petite tête blonde ou brune qui s'est de toute façon un peu fêlée. Il se dit que c'est ici que "Monsieur Vincent" a trempé ses lèvres pour la première fois dans le calice, ensuite bu jusqu'à la lie. Précepteur, il enseignait les bonnes manières. De toute cette histoire, le garçonnet n'a retenu que quelques bribes mais il affirme à qui veut l'entendre qu'un jour la statue du saint lui a lancé un clin d'oeil

Puis l'école a cessé d'être. Des locaux plus vastes et fonctionnels ont vu le jour de l'autre côté du village. Puis l'école est devenue vieille. Elle a donné des murs, imprégnés de l'odeur et de la sueur des compositions silencieuses que se partagent un médecin généraliste et le "Club des Cheveux d'Argent".
Le temps passe.
Le garçonnet est toujours à la recherche de son "Bled" paumé.

(A suivre.)

Joël Fauré


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26 juillet 2007 4 26 /07 /juillet /2007 20:32

Camille s'est informée sur le "méchant" Salazar qui a dirigé la péninsule pendant longtemps.
A Braga, même si elle a voulu atteindre le ciel, telle que je la connais, elle a dû s'arrêter à la troisième des 300 marches qui conduisent à "Bom Jésus do Monte" , un haut lieu de pélerinage (Ma bonne maman, elle, montait à genoux, en égrenant son chapelet les 10 marches d'un calvaire sur le Chemin de Croix, à Lourdes -et après elle s'étonnait que je sois attiré par le Sadomasochisme !-) ; je l'entends s'écrier : "Je préfère rôtir en enfer plutôt que de renoncer aux plaisirs terrestres !" 
Heureusement, le funiculaire était là...
Tout en haut, elle a pris en photo une scène de la flagellation du Christ. Elle a dit : "C'est pour Joël..." Il a fallu qu'elle se perde en explications aux mécréants qui l'accompagnaient...

Elle a vu un petit potier avec un chapeau de papier sur la tête. Et sur le chapeau, il y avait écrit : "Soulevez-moi !" Curieuse Camille a soulevé. Et sous le couvre-chef, savez ce qu'il y avait ?
Un énorme phallus tenu dans une main.
Le petit potier s'est mis à rire de toutes ses trois dents. Et Camille aussi.

Au bord de l'eau -et c'est pas ce qui manque le plus-, Camille s'est approché d'un navigateur qui s'appelle "Alfonso".  Mais ici, tous les naigateurs s'appellent "Alfonso". Et comme il portait de hautes bottes, elle lui a demandé si elle pouvait le prendre en photo. Elle lui a dit : "C'est pour Joël..."
Mais il paraît que la photo est floue.

Demain, Camille retournera en prendre une.
"Alfonso" aura toujours ses hautes bottes : il dort avec.

JF

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Georges PEREC



 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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