26 juillet 2007 4 26 /07 /juillet /2007 12:13
Une volonté de diariste.
Chaque année, pour son "Petit Noël", j'offre à ma mère un agenda... Au jour le jour, elle y note des micro-événements, des méga-anecdotes, des nano-aventures.
Pendant 20 ans, de 1978 à 1998, elle a "tenu rubrique" dans une publication à tirage unique... Au jour le jour, elle a consigné les menus fretins qui composaient sa vie. "Untel est venu nous voir." "Une telle est morte." "Allés au loto. Rien gagné."
Rien d'historique, mais tout d'authentiquement touchant : les menus détaillés, les maladies et les décès de l'entourage, les résultats des élections, les comptes-tenus et les tenus pour comptes. Les traces d'une vie modeste, et d'un train de vie qui n'a rien de pharaonique. Pas de grandes phrases, pas de grands discours, mais une vraie velléité de diariste.
Je garde et je regarde ces annales comme les reliques d'une Sainte.
Gazetière, échotière des menues choses. Delerm bien avant Delerm.

Ephémérides.
Morceaux choisis.
Samedi 3 mai 1978 : semé maïs.
Samedi 15 juillet 1978 : séjour à Lourdes, hôtel Terminus. 184 F.
Dimanche 6 août 1978 : Mort du Pape Paul VI. Crise cardiaque. 81 ans. 15 ans de papauté.
Lundi 14 août 1978 : acheté poulettes cou plumé. 45 F la paire - arrosoir : 18,50 F
Mercredi 13 septembre 1978 : passé commande Mobylette à Coueilles : 2 120,00 F
Samedi 2 novembre 1978 : payé denier du Culte 100,00 F

Par dessus le marché.
C'est comme un lundi. Comme tous les lundis. C'est immuable depuis des temps immémoriaux. A Bessières, le lundi, c'est jour de marché. Il est inconcevable de l'imaginer autrement. Le fragile et délicat Marcel Proust, que j'ai très bien connu, n'aurait aucun mal à me dire pourquoi je rattache le jour du marché au lundi. Par contre, saurait-il m'expliquer pourquoi je rattache ce jour-là à une panière d'osier ? Sans aucun doute en ferait-il sortir divers animaux de basse-cour. Il me faut vous dire que mes parents firent pondre quelques poules, engraissèrent un cochon, élevèrent des canards, des vaches, des lapins et leurs trois enfants. Leurs trois enfants ?

Les jumeaux.
Je viens de m'apercevoir que je n'ai pas parlé de mes frères... de douze ans mes aînés. Voilà ce qui arrive aux écrivains qui n'ont pas de plan de travail...

Mercredi 22 novembre 1950, onze heures

1er jumeau
Le vingt deux novembre mil neuf cent cinquante onze heures est né au hameau des Rouquiès Jean Pierre, du sexe masculin, de Fernand Pierre Guillaume Fauré, né le vingt neuf novembre mil neuf cent vingt deux à Buzet-sur-Tarn, Haute-Garonne, agriculteur, et de Marthe Madeleine Mathilde Trémolières, née le vingt et un novembre mil neuf cent vingt sept à Lestrade-Thouels Aveyron, sans profession, son épouse, domiciliés comme dessus. Dressé le vingt trois novembre mil neuf cent cinquante ; dix heures, sur la déclaration du père, qui, lecture faite, a signé avec nous, Joseph Constans, Maire de Buzet-sur-Tarn.

Mercredi 22 novembre 1950, onze heures une minute

2e jumeau
Le vingt deux novembre mil neuf cent cinquante onze heures une minute est né au hameau des Rouquiès Bernard, Emile, du sexe masculin, de Fernand Pierre Guillaume Fauré, né le vingt neuf novembre mil neuf cent vingt deux à Buzet-sur-Tarn, Haute-Garonne, agriculteur, et de Marthe Madeleine Mathilde Trémolières, née le vingt et un novembre mil neuf cent vingt sept à Lestrade-Thouels Aveyron, sans profession, son épouse, domiciliés comme dessus. Dressé le vingt trois novembre mil neuf cent cinquante ; dix heures (1), sur la déclaration du père, qui, lecture faite, a signé avec nous, Joseph Constans, Maire de Buzet-sur-Tarn.

Or donc, par dessus le marché.
Une -la-panière d'osier était solidement amarrée avec des tendeurs sur le porte-bagages de la grise Mobylette. Je trouvais encore un peu de place pour m'y amarrer aussi , et bien tenir ma mère par les hanches, comme dans une danse incestueuse ; les seules hanches qu'il me fût donné de toucher sans rougir, sans trembler. Nous laissions la Mobylette sous le "Marché aux veaux" et nous marchions vers celui de plein vent.
Bessières a ceci de particulier : la place est ourlée sur un côté d'une sorte de déambulatoire qui la surplombe. Vus de là, les parapluies multicolores des camelots semblent composer un costume d'Arlequin. Il y a une belle photo à faire. Si vous allez à Bessières un lundi, pensez à prendre votre téléphone portable qui fait aussi des photos. Vous penserez à moi.

Ce lundi-là, quel mauvais esprit rôde entre les étals ? Grouillante est la plèbe qui fréquente le marché. Ca parle fort et patois. Ca se reconnaît. Moi, j'aime bien le long camion de bazar "Tout à cent francs" où l'on trouve des petits jouets, des cages à grillons, des attrape-mouches et des objets indescriptibles, rebelles à se retrouver en liste chez un écrivain mélancolique, sauf Delerm.
Tout le reste m'effraie assez. Les forts en gueule qui vous alpaguent pour vous refourguer de la poudre de perlimpinpin, et d'autres qui s'égosillent pour vous vendre leurs salades.
Mais ce que j'ai pris en grippe surtout, ce sont les marchands forains qui vendent des chaussures et des habits.
Rien ne parle mieux que la façon de se vêtir. Tout petit, on me tricota des chandails à toute épreuve, et surtout, on me fit porter la casquette. On s'en est beaucoup servi pour se moquer de moi. Interrogée sur cet attribut, ma mère répondait : "C'est ta grand-mère qui veut que tu la portes. Elle dit que tu risques de prendre froid à la tête."
Ma mère se chargea de me vêtir de pied en cap, à son goût, et je ne voyais en cette tradition de s'alourdir d'oripeaux qu'une contrainte de plus. J'usais les étoffes sur l'auge aux poissons rouges et les salissais de terre glaise ou d'herbe écrasée. Mais quand le bon sens maternel me conduisait chez les boutiquiers de "prêt-à-porter", c'était pire qu'une corvée, c'était un calvaire. Il me fallait prêter mon flanc aux dégoulinants commentaires d'une vendeuse qui se permettait de me taper sur l'épaule comme si nous avions gardé les vaches ensemble... "Tourne, retourne-toi...Marche... Ca serre pas trop ?"
Et moi, pauvre de moi, toujours gêné aux emmanchures, aux entournures, aux encolures et aux pointures, je faisais pivoter ma carcasse comme à Tabarin, en me taisant, sur un socle que la Terre m'avait réservé bancal.

Ce lundi-là donc, quel mauvais esprit éparpilleur rôde entre les étals du marché de Bessières ?
C'est au moment où on ne les redoute plus que les événements redoutés surviennent. Que peut-il m'arriver alors que je suis auprès de la seule personne au monde qui ait su m'apprivoiser ? La perdre. Mais il est si saugrenu de l'imaginer. La perdre. Me perdre. Se perdre. Impossible tant la fusion est forte.
La marionnette ne peut plus exister sans marionnettiste...
Par quel hasard, ou sort mauvais nous sommes-nous dessoudés ? Il suffit d'une seconde, le temps d'un pas trop peu ou pas assez écarté, d'un "surplace" déplacé, ou d'un regard, pas au même moment, pas au même endroit porté ; ou encore d'un de ces intrus zigzaquant, de ces mouches qui changent d'âne pour se retrouver perdu.
Il faut croire que ma mère devait me tenir mal : je me retrouve perdu.
Comme Guillaumet dans les Andes, je me retrouve dans une effrayante odyssée, entre des montagnes de salopettes de Tergal, des terrils de pantalons de velours côtelé, des tumulus de chemises, des dômes de courgettes, des dunes de carottes et bassins d'aulx. Extra-Terrestre veut retrouver maman et rentrer maison.
Je laisse au lecteur le soin d'imaginer quels furent mes sentiments lors de l'épisode. Je lui laisse ci-dessous un espace pour qu'il rédige à son tour, grâce à ses propres ressentis et ses réminiscences scolaires, avec ses propres mots qui disent la peur et toutes les déclinaisons qui vont avec :
:
:
:
:
:
:
:
:

Ma mère n'a jamais été douée pour l'illusionnisme. Pour l'exemple, quand il n'y avait qu'un lapin dans la panière d'osier, elle ne savait pas en faire sortir deux.
Par contre, elle savait parfois se faire magicienne et retrouver son fils perdu.
C'est avec une joie sans mélange que je revis la panière d'osier.

Chic ! J'allais échapper à l'essayage d'un nouvel habit.
Son fils retrouvé, ma mère vendit de joie son lapin pas du tout angora et, avec l'argent du végétarien, me traîna chez "Dulac" m'acheter un pull plus voyant, pour éviter à l'avenir de me perdre sur les marchés. Pour un peu, elle y aurait volontiers cousu des clochettes !

Ma mère ne m'a pas vu grandir.
Je n'ai pas vu vieillir ma mère.
Nous nous aveuglions mutuellement.

(A suivre.)

(1) Et pas dix heures une ?

Joël Fauré












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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 20:27
SI TOUT LE MONDE S'Y MET...

J'ai comme l'impression que, cet été, tout le monde se débride et parle sexe.
Remarquez que je n'y voie aucun inconvénient.
Un instant, j'ai eu peur que l'arrivée du "Caudillo" à l'Elysée ne laissât augurer d'une "contre-movida", à l'inverse de nos amis Espagnols, et un retour des poignets ligotés entravant toute branlette et de la masturbation redevenue coupable de surdité.
Or, si ma vue s'affaiblit -de loin, tant mieux !-, j'ai l'ouïe assez fine.
Et ce matin même sur "France Inter" qu'entends-je ?
Dans "Cha cha tchatche" d'Olivia Gesbert, deux joyeuses filles -je ne sais si elles sont jolies- riantes et osantes sur le plaisir, le clitoris, le point G, etc....
"Une femme est-elle clitoridienne ou vaginale ? Oh, mais vous savez, elle est les deux. Le clitoris se charge de parler au vagin.
Et le plaisir de l'homme ? Oh, mais vous savez
(rires), il n'est pas que dans l'éjaculation."
Que faut-il que je pense que "54 % des femmes simulent le plaisir" ?
Je pensais qu'on en resterait là. Ma mère en avait assez entendu.
Mais non ! "Maintenant, on va à Lyon !" dit l'ex-prude "Paris-Inter". "Au "Luxor", un haut lieu du libertinage." Ben voyons !
Et là, j'entends quoi ?
Une voix me dire, comme le ferait José Sétien annonçant les résultats du loto : "Et là, c'est un donjon. Dans tous les donjons, il y a une croix de Saint-André. La partenaire y est attachée puis fouettée." (Bruit de fouet.)
"Vous écoutez France-Inter, il est onze heures. Les informations : Odile Martin... Un car de touristes Polonais..."

Bon, moi, demain, je file acheter une cravache. J'adore fouetter la crème.

Joël Fauré

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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 15:56
"LA MAISON (D'EDITION ?) BRULE..."

De Joël Egloff, j'avais tant aimé son "Etourdissement"  (Un livre "à atmopsphère" (Prix du Livre Inter en 2005) -Un ouvrier aux abattoirs, dans un pays imaginaire toujours gris, espère, sans trop y croire, changer un jour de vie- ), que je lui avais écrit, aux bons soins de son éditeur, la maison Buchet-Chastel.
"Toulouse, le 14 juin 2005
Bonjour. Je ne vais pas être original en vous avouant que j'ai adoré "L'Etourdissement". Commencé à 22 h 30. Terminé à 23 h 40. Bien sûr, j'ai établi des passerelles et des résonnances avec mon propre vécu. Le transfert -c'est pas original. Je vous épargnerai un long courrier. Simplement, je serais heureux si vous répondiez, même en bas de page de cette lettre, en note, à ces quelques questions (Je suis d'un naturel curieux...)

- Avez-vous travaillé dans un abattoir ?
- Auriez-vous aimé être pilote d'avion ?
Si vous venez signer votre livre dans une librairie Toulousaine, je ne manquerai pas de venir vous saluer.
Bien à vous.
P.S. : Quel beau prénom vous avez !!!
Re P.S. : J'ai regretté l'absence de 2 mots dans le livre : "ECHINE" et "EQUARISSEUR".
Je ne sais pas vous, mais moi, je suis très heureux quand les écrivains écrivent et répondent.
Voici donc ce que m'a écrit à la main Joël Egloff :
"Paris, le 15.VIII.05
Bonjour.
Ce petit mot simplement pour vous remercier de votre lettre qui m'a vraiment fait très plaisir. Pour répondre à vos questions, je n'ai jamais travaillé dans un abattoir mais j'ai eu l'occasion de travailler sur des images d'abattoir. Il m'en restait quelques souvenirs flous. J'ai également fait quelques recherches en ce qui concerne certains détails techniques. Le nom des machines, notamment. Le reste, il m'a suffit de l'imaginer.
Concernant mon désir d'être pilote d'avion, inutile de m'en défendre, vous avez mis le doigt sur l'une de mes innombrables frustrations.
Je n'ai pas encore de rencontre prévue dans une librairie toulousaine, mais si cela s'organise, un de ces jours, j'espère moi aussi que nous aurons le plaisir d'échanger quelques mots. Encore merci ! Très cordialement.
P.S. : Je trouve que votre prénom n'est pas mal non plus.
Re P.S. : Pour le mot "équarisseur", je dois reconnaître son absence, mais en ce qui concerne "Echine" : Objection ! Il y est page 23..."
Au dos de l'enveloppe, il y avait la contre-adresse. Je n'en ai pas abusé, et j'ai laissé Joël tranquille.
Et voici que Joël m'adresse, en ce vendredi 20 juillet, une carte postale !
Enfin, "m'adresse" est un peu présomptueux ; je devrais plutôt dire qu'il "nous adresse", à nous ses lecteurs, via les colonnes du "Figaro" des nouvelles terrifiantes :
"Nice, le 20 juin 2007.
Cher Vieux,
(...)
Lorsque tu nous a proposé ta maison de la Côte, pour les vacances, cela partait d'une généreuse intention et encore une fois nous t'en remercions. (...)
Ta proposition nous a touchés, mais souviens-toi, je t'ai répondu que nous n'avions pas l'intention de partir, à cause de ce roman que je comptais finir. Tu as insisté pourtant. (...)
Alors au bout du compte, j'ai fini par céder. (...)
La suite, tu la connais. Tu as été prévenu, on t'a expliqué tout en détail. (...)
Ta maison, évidemment, l'assurance te la remboursera. Tu la feras reconstruire, plus belle encore, et pour toi qui semblais t'en lasser, c'est peut-être même une aubaine. Le jardin aussi renaîtra de ses cendres, tout comme les forêts aux alentours. La terre brûlée n'en sera que plus fertile.
Nous pourrions nous estimer heureux, en fait, si seulement j'avais pu sauver mon manuscrit des flammes. Deux ans de travail partis en fumée. Mon meilleur roman, je le pressentais. Celui pour lequel je nourrissais les meilleurs espoirs.
Je ne t'en tiens pas, bien sûr, pour responsable, mais ce manuscrit, dont je n'ai retrouvé que les quelques pages calcinées que le vent, comme pour me narguer, a accrochées dans ce qu'il reste des arbres, personne ne me le rendra jamais et tu imagines à quel point cela me désespère. Comment vais-je m'en remettre ? Que comptes-tu faire ? Comment peut-on s'arranger ? As-tu une idée ?"
Animé d'une authentique compassion, j'ai écrit à Joël Egloff, puisqu'il avait donné son adresse :
"Le 21 juillet 2007.
Bonjour Joël.
J'ai lu dans "Le Figaro" du 20 votre carte postale.
J'ai éprouvé l'irrépressible besoin de prendre la plume.
La perte d'un manuscrit est une épreuve.
La question que je me pose est la suivante :
- Si votre texte est fictionnel, je vous comprends ; si votre texte est autobiographique, je vous comprends et je vous plains. M'en direz-vous plus ?
Cordialement à vous.
P.S. : Et merci d'avoir répondu à ma 1ère lettre."

Celle-ci a été postée hier, le 23 juillet.

Joël Fauré

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Quelques nouvelles de Camille C.

Camille a répondu aux grands sourires des vieilles dames édentées, vêtues de noir jusqu'au cou. Camille a croisé un vieux monsieur, sur un vieux vélomoteur auquel était accroché une remorque, et dans la remorque, il y avait un énorme cochon. Camille l'a croisé plusieurs fois... On lui a dit que le vieux monsieur amenait le cochon "saillir" des truies... C'est un cochon-étalon...
Camille ira samedi à la fête au village, à l'ancienne... 
Camille poussera sa route jusqu'à Lisbonne, où l'on sait maintenant que Fernando Pessoa l'attend...
Je suis heureux de savoir que Camille se trouve actuellemnt dans ce beau pays, même su l'un de ses principaux cours d'eau s'appelle "Sado".


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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 11:35

A Marie-Madeleine,
une maman importante.


Dans l'Aveyron.
Marthe, Madeleine, Mathilde est née dans l'Aveyron. L'Aveyron est un département Français qui resssemble à une grosse motte de terre qui sent bon après avoir été retournée. Dans l'Aveyron, un couteau n'est pas un couteau, c'est un "Laguiole". Un fromage n'est pas un fromage, c'est un "Roquefort". Quand une ville est ville, elle est franche. Villefranche. Villefranche-de-Panat, Villefranche-de-Rouergue.
Je n'ai jamais compris pourquoi l'Aveyron n'avait pas "son" Pagnol. Si vous voulez, moi, je veux bien le faire. Dans l'Aveyron, il y a mieux que Rome, il y a Saint-Rome. Il y a mieux que l'Afrique, il y a Saint-Affrique
Saints et saintes du paradis semblent s'être donnés le mot et rencart ici, entre les tables, les étables et les rétables.
Le frère tout proche de ma mère, René, ne s'y est pas trompé. C'est ici qu'il a souhaité devenir prêtre.
N'étaient les illustres écrivains qui m'ont précédé, je parlerais bien volontiers du "Journal d'un curé de campagne."

Mon oncle.
Ma mère est la cadette d'une fratrie de dix enfants. Mon père est fils unique. Ca rétablit l'équilibre dans les rassemblements familiaux !
Ainsi donc, au début des années 40, un garçon se dégagea bientôt et se découvrit une vocation. Il entra au Petit, puis au Grand Séminaire et fut ordonné prêtre. 
Avec le solide bon sens de la Terre Aveyronnaise, et le sang volontaire qui court dans ses veines, le frère de ma mère, mon oncle, l'abbé René Trémolières devint le prêtre écouté, respecté, eu égard au sacerdoce qu'il avait embrassé.
A ma mère, il a affectueusement donné le prénom de "Marthou".

Dans les bruyères Rouergates, il aimait chercher des champignons, et surtout en trouver ; dans les clairs ruisseaux de montagne, il aimait pêcher la truite, et parfois -que Dieu le lui pardonne !- la saisir à mains nues à même les cours d'eau, sous les panneaux "Pêche Interdite". A la chaire de vérité, le dimanche, pour expier ses peccadilles, il reconnaissait simplement qu'il était "pecheur" sans trop mettre l'accent, et invitait ses ouailles Saintes-Romaines à prier avec lui. 
A table, on servait des cèpes et du poisson.

Tout me porte à croire "qu'heureux est celui qui croira sans avoir vu", que "Dieu, c'est comme du sucre dans un café : il est là, mais on ne le voit pas, et plus on le cherche, moins on le trouve."
Il est vraiment grand le mystère de la foi.
Mon Dieu que les béatitudes sont belles ! J'ai presque envie de les récrire ici. Mais si Dieu existe, le Diable existe aussi alors ? Les flammes de l'Enfer éclaireraient-elles le Paradis ?
A quoi pensais-je justement, quand, enfant, sagement assis près de ma mère, je levais les yeux vers les voûtes de l'Eglise Saint-Martin, de Buzet-la-Forêt ?
Saint-Martin était un brave type : il donnait un morceau de son manteau à ceux qui avaient froid. Avec l'immensité du ciel pour unique univers et pour unique garde-robe le ruban bleu de Notre-Dame-de-Lourdes, c'était l'époque de tous les "possible".

Ma sacro-sainte famille vouait aux Saintes-Régionales de l'étape (Sainte-Germaine à Pibrac ; Sainte-Bernadette à Lourdes) une fervente admiration. On pouvait aller les voir avec le car. (Fatima, c'était plus loin !) On plaignait ces filles pauvres et souffreteuses (terribles écrouelles de Germaine). Parce qu'elles avaient souffert, elles pouvaient comprendre celles et ceux qui souffraient aussi.
On offrait des messes pour les "âmes du Purgatoire" et les défunts, venus et à venir. "Je ne vous promets pas d'être heureux dans ce monde, mais dans l'autre."

Ma mère ne m'a pas vu grandir.
Je n'ai pas vu vieillir ma mère.

Seuil critique.
Quelques phrases toutes faites à l'intention de celles et ceux qui n'aiment pas ce livre :
1) Fauré lance des pistes mais n'en exploite vraiment aucune. On reste sur sa faim.
2) Je n'aime pas ce livre : c'est décousu, déconstruit; déhanché...
3) Encore un livre nombriliste d'un loser de la vie...
4) Fauré passe du coq à l'âne, si vite qu'on ne sait plus qui fait le coq et qui est l'âne...

(A suivre.)

Joël Fauré



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24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 11:25

img075.jpg
"[Des] cas [de fétichisme] peuvent faire sourire. Ils n'en illustrent pas moins un érotisme plus construit, élaboré et finalement civilisé que le sexualité considérée comme "normale" et qui, par son incapacité à dissocier érotisme et procréation, est directement responsable de deux immenses charniers, celui des avortements et celui de la famine dans le Tiers-Monde."
Michel Tournier (Le Fétichiste) - Gallimard.


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23 juillet 2007 1 23 /07 /juillet /2007 18:47
LA SUITE DE  "LA FEMME DE MA VIE"
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22 juillet 2007 7 22 /07 /juillet /2007 20:05

C'est comme ça, je ne me referai pas.
Ce devait être il y a une bonne dizaine d'années. J'effectuais mes premiers séjours dans ce qui allait devenir ma "résidence secondaire", ma "maison de répit" : la clinique psychiatrique "Castelviel", près de Toulouse. J'allais y apaiser le feu de mes dragons, poser un temps ma fatigue physique et psychique...
La vie, le temps, la pudeur m'ont dicté de ne pas dire qui j'y ai côtoyé... 
Ainsi le père de cet homme de télévision, maniaco-dépressif, qui me laissa m'asseoir près de lui, et me parla de Dali, qui, en guise d'autographe, lui offrit un chèque de une péseta ;
Ainsi la fille, adolescente alors, de  cet écrivain réputé dont ma mère a dévoré tous les livres ;
et surtout, ce prof de lettres, qui, par affinité élective, m'écrivit ceci :
"9.VIII
Nouvellement -mais néanmoins cher- ami,
Ce petit mot, pour vous laisser du temps.
Entre autres de vos pièces -et dans un but d'utilisation pédagogique- j'aimerais assez que vous puissiez tenir + ou - moins rapidement un exemplaire de votre pièce "L'Agence". D'après la lecture de votre press-book, c'est l'oeuvre qui m'a semblé la mieux adaptée à celle d'un jeune public, et à son "backround" environnant, mais c'est déjà un pléonasme.
Prenez votre temps ; il y a bien sûr des contraintes matérielles. Mais veuillez-y tout de même.
Je pars demain -croisons les doigts- mais j'ai pu apprécier dans nos quelques rencontres, un homme affable et humaniste, mais surtout un de ces héros de Tournier qui savent transformer un destin négatif en quelque chose de positif.
Ce fut une réelle joie de vous avoir connu, mais quelque chose me dit que nous n'en resterons pas là.
Votre.
D.B."
Je n'ai jamais revu D.B. 
Il m'avait beaucoup parlé de Michel Tournier, dont il était ami. De Michel Tournier, j'avais bien entendu dévoré "Le Fétichiste".
J'ai écrit une lettre à Michel Tournier... que je ne lui ai jamais envoyée.
Et le temps a passé.
Et ce soir, je ne sais pourquoi, j'ai interrogé -comme je l'avais fait avec Jeanne de Berg- les pages blanches de l'annuaire téléphonique, sur Internet maintenant, et j'ai tapé "Michel Tournier" dans l'endroit où je savais qu'il résidait, dans ce presbytère de la vallée de Chevreuse. (Il suffit de vous rendre sur l'excellente encyclopédie "Wikipédia" pour en "savoir" plus.
Comme tous les grands timides, je suis capable de grandes audaces, et j'ai appelé Michel Tounier. Et je lui ai parlé, en direct ! 
Bien entendu, je n'aurais pas voulu apprendre de sa bouche que D.B. s'était suicidé. Je ne compte plus les rencontres de "Castelviel" qui l'ont fait...
Le but de mon appel était précis : je souhaitais avoir son accord pour écrire en façade de ce blog, "JOURNAL EXTIME", terme dont il est l'inventeur.
Non seulement je l'ai eu, cet accord -et j'ai senti son plaisir lorsqu'il a renchéri : "Je suis heureux de voir certains de mes mots inventés dans le dictionnaire- mais nous avons taillé de bout de gras comme deux amis qui se connaissent depuis toujours !
Comme j'étais ému de lui parler, il me dit :
"Vous savez, j'ai laissé mon nom dans l'annuaire... je suis public... le plus ennuyeux, c'est quand on m'appelle parfois pour me vendre des chaussettes..."
Michel Tournier, 83 ans, membre de l'Académie Goncourt, auteur majeur du XXe siècle, a fait une mauvaise chute il y a quelques temps, mais n'a pas perdu le sens de l'humour :
"Je suis plein de métal."
Et comme je lui rappelai ses "anecdotiques" rencontres avec François Mitterrand ("Il est venu 4 fois." -il se posait en hélicoptère devant chez lui-), il me dit tout simplement :
"Vous savez, j'ai fait de mon mieux pour le recevoir. 
Peut-être que Satkozy va se décider ?"

 
Joël Fauré

PS : Un grand merci à vous, Monsieur Tournier. Vous m'avez dit que vous n'aviez pas d'ordinateur, mais vous avez beaucoup d'amis... Ce qui rétablit amplement "l'équilibre"...

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22 juillet 2007 7 22 /07 /juillet /2007 15:09
La Maison.
Nous habitions, sur les "Champs Grands", une maison très grise et isolée, en orée de la forêt de Buzet-sur-Tarn.
Buzet-sur-Tarn et Bessières se touchent mais ne se confondent pas.
Je n'ai pas gardé de souvenirs de la ferme où vivaient mes parents avant qu'ils "fassent construire" en 1967. Je n'ai retrouvé que des éclats. M'est avis qu'ils ont emprunté une somme que ma mère a dû qualifier de "colossale" au "Crédit Foncier de France", remboursable sur une bonne partie du XXe siècle, sans que le taux d'intérêt ne changeât d'un centime. Si bien qu'aux derniers temps, ils payaient la dérisoire somme de deux-cents francs mensuels. J'ai toujours associé la maison à ma mère : c'est ma maison-mère...
Mes parents n'avaient ni auto ni permis pour la conduire. Ils se véhiculaient à deux roues. Ma mère me transportait à même le porte-bagages de sa grise "Mobylette".

Nom de lieu.
Buzet-sur-Tarn ne se situe pas dans le département du Tarn, comme son nom semble l'indiquer, mais dans celui de la Haute-Garonne. Pour éviter la confusion, je suggère aux décideurs de rebaptiser Buzet-sur-Tarn Buzet-la-Forêt ; ce serait plus judicieux, vous ne trouvez pas ? C'est comme l'autre Buzet de France : Buzet-sur-Baïse, dans le Lot-et-Garonne. Là encore, une malencontreuse confusion est possible : imaginez que l'on oublie le tréma sur le "i"...

Malle de mère.
Ce serait comme un résumé dans un vieux "Télé 7 Jours", du genre "Si vous avez manqué le début...", avec son petit pictogramme : une chaise vide devant un poste de télévision. Avis de l'Office Catholique : pour tous.
"Sa mère morte, Joël doit précipitemment quitter et vider la maison qui doit être vendue. Il entasse les effets de sa mère dans des malles.
Quelques années plus tard, il rouvre ces malles..."

De la difficulté d'écrire un livre sur sa mère.
"Aujourd'hui, maman est morte." C'est la première phrase du livre d'Albert Camus, "L'Etranger". Un autre Albert, Cohen a écrit un livre puissant et indispensable "Le livre de ma mère".
Comment passer après eux ? Pourquoi passer après eux ? Pourquoi écrire un livre alors que je sais pertinemment que, de nos jours, tout le monde écrit mais plus personne ne lit ? Ma mère me disait : "Ne lis pas ce livre, tu vas devenir fou." Parlait-elle du "Grand et du Petit Albert", le Livre Maudit ? Je suis effectivement devenu fou, mais uniquement parce que je n'ai pas lu assez de livres...
Je ne sais pas écrire. Mais j'essaie. C'est méritoire, non ? Ils vont peut-être le dire au "Masque et la plume", la féroce émission critique de France Inter ?
Et puis, tant pis, je me lance ! Quand j'ai appris que la mère de Philippe Delerm s'appelait Marthe elle aussi, alors là, j'ai pas hésité, j'ai sauté le pas.

Je me suis mis à l'aise tout de suite. Les écrivains sont des gens tellement spéciaux. Et les critiques, paraît-il, des écrivains refoulés... Or, si je suis absolument certain de n'être pas critique, je me suis dit que je n'étais pas tout à fait sûr d'être un écrivain. Mais j'écris peut-être ça pour qu'on me dise le contraire. Des phrases qui commenceraient par : "Mais si..." ou "Là où je ne suis pas d'accord..." Je me suis dit que, avec une histoire derrière moi, je n'aurai peut-être que moi pour unique lecteur, mais au moins, je serai en règle avec ma volonté.
Et puis, tiens, je ne chercherai pas à styler. Si je n'ai pas de talent, il me reste de la mémoire. On placera le livre au rayon "Faits de société". Je vais écrire "décousu".

(A suivre.)

Joël Fauré

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J'ai appris, lu, vu, entendu, pensé cet été...

J'ai entendu cet été... une jeune maman dire à son fils : "Mais qu'est ce que tu fabriques ?"
Si la mère d'Edouard Michelin, avait posé la même question, aux alentours des années 1870
à son fils, ce dernier aurait-il répondu :
"Pour l'instant, rien, mais je songe à fabriquer des pneumatiques." ?

*

Des nouvelles de Camille C.

Je lève les yeux vers le ciel. Je balaie avec mon regard, comme le ferait une caméra. Je demande à mon ordinateur personnel : "ciel du Portugal". Ponte de Vagos. Je zoome et tu es là. Je te vois.
Alors, quelles nouvelles ?
"Nous sommes à dix kilomètres de l'eau." Celle qu'a connue Vasco de Gama ?
"J'ai vu des cigognes, dans leurs nids, sur les portiques des routes. Notre hôte nous a dit : "Ici, nous avons 20 ans de retard." (Si l'on vous dit : "La fin du monde est dans 10 minutes, que faites-vous ?" Partez-donc au Portugal, vous gagnerez du temps.)
J'ai prêté à Camille un livre de mon grand ami Fernando Pessoa. Elle m'a dit qu'elle irait le saluer de ma part, à Lisbonne où, attablé et écrivant à la terrasse d'un café, il l'attend...


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21 juillet 2007 6 21 /07 /juillet /2007 15:09

A ma mère.
Pour ma mère.
A cause d'elle.
Grâce à elle.

"Chaque homme est seul,
et tous se fichent de tous,
et nos douleurs sont une île déserte."
Albert Cohen (Le livre de la mère)


Premier Acte
L'An mil neuf cent soixante deux, le cinq octobre à dix neuf heures cinq, est né rue Réclusane 78, Joël Alain Claude, du sexe masculin, de Fernand Pierre Guillaume FAURE, né à Buzet sur Tarn Haute-Garonne, le vingt neuf Novembre mil neuf cent vingt deux, agriculteur, et de Marthe Madeleine Mathilde TREMOLIERES, née à Lestrade Thouels Aveyron, le vingt et un novembre mil neuf cent vingt sept, sans profession, son épouse, domiciliés à Buzet sur Tarn Haute Garonne.
Dressé l'an mil neuf cent soixante deux, le huit octobre, sur la déclaration de Simon Salvat, soixante dix ans, employé rue Réclusane 78.
Lecture de l'acte lui a été faite, puis invité à en prendre directement connaissance, il a signé avec Nous, Charles MONFRAIX, Fonctionnaire à la Mairie de Toulouse, délégué.
Mentions au Répertoire Civil : néant.

C'est une photo
C'est une photo. C'est l'été. C'est bien. C'est une fête foraine. C'est à Bessières, près de Toulouse. La photo n'est pas datée. Je la situe vers la fin des années soixante. Le photographe ambulant n'a pas dû beaucoup insister pour que ma mère se laisse figer sur la pellicule avec son petit tardillon non-désiré.
Combien a-t-elle payé ?
Mon Dieu qu'elle est belle, ma mère.
Elle : ensemble noir tombant bien. Ceinture blanche à la taille. Escarpins noirs. 
Moi : casquette noire à visière blanche, pantalon court à bretelles noir, polo blanc, socquettes noires, chaussures spartiates blanches... 
Prise dans le tourbillon des sollicitations de la fête, et aussi, je dois bien l'admettre, cédant à mes caprices d'enfant gâté, elle vient tout juste de m'acheter un jouet qu'elle tient dans sa main gauche. C'est une superbe diligence en matière plastique noire, tirée par deux chevaux blancs. L'attelage est encore sous film de cellophane. Je l'ai sans l'avoir. Je la vois sans l'avoir. Le bras gauche de maman, replié, retient les anses d'un joli sac à main noir.
Une image vaut mille mots. A ce point du texte, où en est la jauge ? 
Cent-quatre vingt dix neuf ? Deux cents ?
J'ai encore de la place pour être juste, complet.

A y regarder mieux, l'oeil -mon oeil- donc reculé, y voit, au second plan, une volée de six marches qui conduit au kiosque à musique, désert à cette heure, mais où l'orchestre, tout-à-l'heure, lorsque nous serons partis, fera danser celles et ceux qui savent. Près de là, un haut-parleur atteste que cette photo est très parlante.
Quelle est la marque de la voiture blanche, dont on aperçoit un morceau, garée derrière le kiosque ? Une fausse-amie 6 Citroën ?
Mais je m'égare, je digresse, je dilue.
Ce qui est important, c'est le bras droit de ma mère, tendu vers l'arrière. Il semble me tracter, tant je suis en retrait. Nous sommes main dans la main. Pour le bras gauche, ça ira, il y a ma mère. Mais le bras droit est crispé, tendu comme une arbalète. Le poing est serré. 
Je crois que c'est la faute de ce satané photographe qui nous a empêchés de nous déssouder...

Mes genoux semblent vouloir se toucher ; mes chevilles s'écarter : on appelle ça un génu-valgum. Vais-je passer ma vie sur les premiers ? N'y-a-t-il pas de risque de voir enfler les secondes ?

L'attaque de la diligence...
Pour l'instant encore, elle est protégée. En garde rapprochée. Mais lorque nous serons à la maison, mon père me dire : "Oh, avec toi, elle sera vite cassée... Brise-Fer..."
img073.jpg

(A suivre.)

Joël Fauré

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20 juillet 2007 5 20 /07 /juillet /2007 19:44

"A PROPOS DE BOTTES" : LE LIVRE !

img072-copie-1.jpg

J'ai déniché dans un "vide-grenier" un livre insolite.
Il s'intitule "A PROPOS DE BOTTES"
Il ne pouvait donc pas échapper à ce qu'il reste de mon acuité visuelle.
L'auteur est un certain "Antoine de Gravillon". Le dépôt légal date de 1865.
L'ouvrage, broché, est édité chez "Achille FAURE", libraire-éditeur à Paris.
Il est copieusement illustré d'une splendide "eau forte" et de nombreux croquis à la plume de l'auteur, tous très beaux eux aussi.
Comment dépeindre cette rareté ?
Ce n'est ni un roman ni un essai.
C'est une "déambulation réflexive" au gré des pas de l'auteur.
Une chose est sûre : ses bottes l'ont beaucoup inspiré !
La prose est racée ; la sensualité affleure le texte.
Le mieux encore est de vous livrer les premières lignes.

"Quel excellent titre, -bien que proverbialement vulgaire,- si je voulais m'en servir comme de passe-port ou de port d'arme pour battre la campagne en votre compagnie, lecteur de bonne volonté qui ouvrez ce livre prêt à suivre à l'abandon un chasseur imaginaire ou un touriste sentimental !
Ne semble-t-il pas que je vais, ainsi chaussé, vous entraîner sur l'heure par monts et par vaux, dans les lointains domaines de la fantaisie et vous exposer, -hors de tous propos,- aux hasards d'un voyage en zigzag, tantôt à pied avec les bottes de sept lieues  du petit Poucet, tantôt sur monture fantastique avec la Folie en croupe et ses grelots en collier ? -Dieu nous garde d'une semblable divagation !
Permis sans doute de digresser et de prendre tel ou tel détour de la route , auparavant faut-il savoir où l'on va quand on part, et où l'on abordera lorsqu'on s'embarque. Ce monde est grand ; on s'égare dans ses bois ; on se noie dans ses ondes. Encore n'est-il rien, -sous le soleil-, comparé à celui où, -en dessus de la lune-, vagabonde l'esprit.
C'est pourquoi, vous rattrapant vite par le pan de votre manteau, et tournant bride à toute illusion, je vous ramène au vrai sens de mon intitulé ; et dussiez-vous tomber de haut, je vous invite, vous voyant venir, à prendre sans façon mes bottes pour ce qu'elles sont réellement, au pied de la lettre et à la lettre ou mesure de votre pied, -à supposer toutefois que ma forme vous convienne. Il ne s'agit point, en effet, de bottes chimériques ou figurées, mais de de celles que m'a bel et bien livrées, ce matin même, au saut du lit, mon cordonnier, habile faiseur entre tous, et dont je voudrais, si ce n'était réclame, crier le nom des pavés au toit, à corps perdu."

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Brèves :

ROBES DE CHAMBRES

Personnellement, c'est ce que j'aurais titré, jeudi,  pour la série du cahier d'été de Libé consacré aux objets -du fil à couper le beurre au crucifix- . Mais je ne suis pas titreur à Libé, et ce dernier a choisi "Apparat chic".
"Elle produit une impression sur celui qui la voit, mais aussi sur celui qui la porte."
Qui "elle" ? 
Une botte-cuissarde ?
Non... une robe... d'avocat !

*

DELACAGE  HORAIRE ?

Lu sur une note d'entreprise :
"Urgent à vérifier.
Attention, veuillez vérifier si vous n'avez pas commis d'erreur de saisie (dépalcement de virgules ou ajout de zéros) qui fait dépasser l'enveloppe des frais."

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