Chacun reconnaîtra F.F., N.S. et J.-L.B.

Un problème technique nous oblige à reporter à demain la publication du 15e épisode de "J'AI TRES BIEN CONNU JACQUES BREL"
Brèves :
"A PROPOS DE TONGS"
Demain, premier jour de l'été. Eté. Participe passé du verbe d'état "être". On devrait pouvoir dire "étant".
"L'Etant". Participe pressant. Ou pressé.
Mais pas de sémantique. "Les cahiers au feu et les maîtres et maîtresses au beau milieu."
Mon Dieu que les pieds de femme sont jolis ! Qu'ils soient Egyptiens (le gros orteil est plus long que les autres.), Grecs (c'est le deuxième orteil qui est plus avancé.), ongles laqués, talons
ensanglantés par ces fichues chaussures neuves à sangles, ils feront trempette dans la mer de Chine (N'est-ce pas, Zita ?) ou dans une bassine d'eau salée, le soir, à la fraîche.
Et ce sera si bon...
Le fétichiste des cuissardes que je suis est un fétichiste 'raisonné". (Du moins, j'ai la faiblesse de le croire.)
Aussi, je ne débaptiserai pas l'enseigne de mon blog pour le renommer "A propos de tongs", mais j'attendrai sagement l'automne et l'arrivée des nouvelles collections.
J'ai acheté à ma dulcinée une paire... de nu-pieds en prévision des beaux jours.
Sur la boîte (utile, une boîte pour ranger ces petits "riens" à la Prévert), j'ai écrit :
"Ceci, ces va-nu-pieds spartiates pour te prouver que je suis un fétichiste "raisonné" ;
Attendu que tes jolis petons prendront l'air et verront l'herbette du "Champ du Signe" et des "Beaux Ares" ;
Le Tribunal de l'Eté,
Par ces motifs,
Et afin que nul n'en ignore
Condamne
les bottes et les cuissardes à être pendues.
Dans la penderie."
JF
I et 3 ne font pas 4. Ni 13. Mais I3 comme le I3 de I3rel.
Faisons un rêve...
"Le plus court chemin d'un point à un autre, ce n'est pas la ligne droite ; c'est le rêve." (Entendu dans un film.)
La maison de Buzet est un navire qui, la nuit, s'enfonce dans le sol et vogue sur des ondes magiques, et, au petit matin, regagne sa place isolée, à l'orée de la forêt.
Dans le même bateau.
France, la fille de Brel, et Maddly Bamy, sa compagne, sont fâchées. Elles avaient embarqué avec Brel sur l'Askoy, un voilier. A bord, la cohabitation se passe mal. Le capitaine demande
à l'une des femmes de débarquer... Alors, forcément...
Méningite.
Réactions méningées.
Je suis né le 5 octobre 19.., dans cette bonne ville de Toulouse, où l'on trouve, comme dans toutes les villes du Sud de la France, un peu de soleil, beaucoup de lumière et deux ou trois
monuments romains.
Après avoir été agriculteur, mon père travaillait dans une manufacture de caoutchouc et de bottes.
Toulouse est un port.
Si on construit un petit bateau en papier et qu'on le met à flot Port de la Daurade, il voguera jusqu'à Bordeaux. Le Château d'Eau est un phare. Au pied du mur du musée des Augustins, sous la
gouttière, il y a des bêtes effrayantes, qui ont la bouche ouverte en permanence ; elles semblent avoir la dalle ; en fait, elles dégueulent les eaux de pluie... Personne ne semble vraiment s'en
soucier...
Avec I3rel, c'est bien commode. Il suffit de reprendre ses phrases pour construire des textes. Difficile d'y échapper. Permettez-moi de ne pas éviter de tomber dans le piège et de choisir cette
facilité. Parler de Brel sans employer certains mots relève de l'exercice de style.
1978 : l'année de la disparition de Jacques Brel.
L'année où nous avons connu 3 papes.
Depuis, en bientôt 30 ans, nous n'en avons connu que 2.
Le trop et le peu gâtent le jeu.
Ecrire.
Ecrire, c'est pas bien difficile. Tous les mots sont dans le dictionnaire.
Ecrire est une activité de coucou qui consiste à remarquer, retenir et replacer des mots.
Je vais essayer d'écrire une chanson :
"Toi, tu répares les voitur'
Toi, tu grimpes sur les toitur'
Et toi tu construis un mur
La la la la la la la la
La la la la la la la la..."
Bon , je reconnais, finalement, c'est pas si facile...
Je suis jaloux de Philippe Delerm.
Pourquoi Philippe Delerm a du succès et pas moi ? Ce qu'il a écrit sur Brel dans "La première gorgée de bière", j'aurais pu l'écrire moi aussi. Je suppose que Philippe Delerm n'a pas
trop de mal à payer son loyer, ses factures, ses assurances... Moi, si. Je suis jaloux. Par contre, si je le rencontre un jour, par exemple dans une foire aux livres et aux cucurbitacées, je
crois que lui dirai quand même : "J'aime beaucoup ce que vous faites." Parce que... On sait jamais... Dans notre pays, on doit compter 30 millions d'hypocrites et 30 millions
d'égoïstes, qui permutent leurs rôles, quand ils ne cumulent pas.
Par contre, vous croyez que je pourrais lui avouer ce que j'ai fait de son livre "La première gorgée..." ? J'ai surligné le mot "on" chaque fois qu'il apparaissait dans les
pages...
On en trouve beaucoup : ...
Ca m'a rappelé une histoire que m'a raconté ma mère. Al 'école, elle avait écrit une rédaction. Ca commençait comme ça : "On tue le cochon... On fait ceci... On fait cela... On... On... On...
On...On... On... Ca faisait joli sur la feuille, tous ces ronds...
A Toulouse, nous avons le sens de l'allitération. N'avons-nous pas le Pont Pompidou ?
(A suivre...)
Joël Fauré.
Je me vois contraint de porter à la connaissance de tous l'indiscrétion dont fit preuve madame Avy. Un jour, elle nous distribua le
texte du Plat Pays, polycopié sur une machine qui puait l'alcool à plein nez. Elle nous intima l'ordre de porter en marge quelques annotations, que je
reproduis ici bien volontiers.
Près de "Où des diables en pierre décrochent les nuages", elle nous fit souligner diables en pierre et noter :
gargouilles. (Périphrase.)
"Avec un ciel si bas qu'il fait l'humilité." : près d'humilité, elle tint à ce qu'on accole modestie.
"Avec un ciel si gris qu'un canal s'est pendu." : elle nous infligea : idée de suicide.
Elle nous intima l'ordre d'englober par une accolade les vers :
"Avec un ciel si gris qu'il faut lui pardonner,
Avec le vent du Nord qui vient s'écarteler
Avec le vent du Nord, écoutez-le craquer."
et de noter le mot : litanie.
Elle nous fit remarquer une implacable évidence : "il est le jouet des vents."
Enfin, elle nous fit comprendre que par "Quand le vent est au rire, quand le vent est au blé, quand
le vent est au Sud, écoutez-le chanter, le plat pays qui est le mien", le Belge voulait évoquer le renouveau des blés.
Mais ce n'est pas tout. Sur la copie simple gros carreaux deux trous sans oeillet, je lis, à la date du 19.3.77, souligné deux fois en rouge une indiscrète question : Dites ce que vous pensez de ce texte : parlez des paroles, des idées, de la musique.
Avec le savoir de mes quinze ans, je réponds :
"Les paroles sont nostalgiques. Elles montrent que l'auteur aime son pays. Il veut faire ressortir à travers ces paroles la lutte perpétuelle de ce pays contre
la mer et il souhaite que ce pays réussisse dans son entreprise."
Madame Avy tient à une bonne correction collective en vert. Elle me fait rajouter "et poétiques" après nostalgiques. Et en marge : "Elles présentent le pays avec tous ses défauts et toutes ses qualités.
Des comparaisons et des personnifications très réussies. Une musique triste."
Et pendant que nous planchons sur son texte, je suis sûr que Brel, en mars 77, aux îles Marquises, pour faire la nique à ses canaux esquintés qui n'ont pas le moral, flatté malgré tout qu'on se
renifle ses vents dans les collèges, doit se réconforter avec un bon cassoulet qu'il a fait venir de métropole.
Le Plat Pays.
J'en connais qui auraient eu bien besoin de faire leurs classes avec madame Avy. Brel rapporte souvent cette anecdote qui le poursuit. Un illustrateur le sollicite. Il veut mettre en images
"Le Plat Pays". A la deuxième strophe, le canal perd ses eaux pour endosser les plumes d'un canard. Sur la prose des vents, on voit un canard se perdre et se pendre !... Ces considérations cynégétiques mettent Brel dans l'embarras. Il confie à François
Rauber : "Tu vois, j'articule mal..."
Autre atteinte fatale à ce pays auquel certains donnent des vallonnements : une petite brochure reproduit le texte. Ce qui nous donne à la troisième strophe : "avec un ciel si bas qu'il "feint" l'humilité." en lieu et place de "fait" l'humilité.
On ne peut constater cette confusion, bien effective, que dans les fontionnariats d'Etat... Mais il est loin d'être heureux de se tromper ainsi de verbe d'action qui dénature la réalité d'un
chef-d'oeuvre de la chanson Belge. Qu'il est difficile de se faire comprendre !
Je comprends que Brel ait dit souventes fois : "Les gens n'ont rien compris à mes chansons."
Souvent encore, je ne saisis pas un mot dans une chanson, pourtant aimée, entendue souvent. Et puis un jour, c'est la révélation : les tympans se dégagent et le mot s'éclaircit jusqu'à
briller enfin.
Voulez-vous devenir éléctronicien ?
Pour l'examen C.A.P. spécialité Eléctronicien, une académie bien de chez nous, dans un cartouche en bas de page, soumet aux sujets-candidats, en épreuve d'expression française, dont le temps
alloué est de 1 h 30 minutes, coefficient 1, le texte suivant :
On est deux mon amour
Et l'amour chante et rit
Mais à la mort du jour
Dans les draps de l'ennui
On se retrouve seul.
On est dix à défendre
Les vivants par des morts
Mais cloué par leurs cendres
Au poteau du remords
On se retrouve seul.
On est cent qui dansons
Au bal des bons copains
Mais au dernier lampion
Mais au premier chagrin
On se retrouve seul.
On est mille contre mille
A se croire les plus forts
Mais à l'heure imécile
Où ça fait deux mille morts
On se retrouve seul.
On est million à rire
Du million qui est en face
Mais deux millions de rires
N'empêchent que dans la glace
On se retrouve seul.
On est mille à s'asseoir
Au sommet de la fortune
Mais dans la peur de voir
Tout fondre sous la lune
On se retrouve seul.
On est cent que la gloire
Invite sans raison
Mais quand meurt le hasard
Quand finit la chanson
On se retrouve seul.
On est dix à coucher
Dans le lit de la puissance
Mais devant ces armées
Qui s'enterrent en silence
On se retrouve seul.
On est deux à vieillir
Contre le temps qui cogne
Mais lorsqu'on voit venir
En riant la charogne
On se retrouve seul
Le texte est signé Jacques Brel. Une fois encore, l'Education Nationale, inquisitrice, met à la question les futurs impétrants-tripoteurs de câbles, transistors, circuits et
autres résistances.
Elle se permet de leur demander :
1°) Ce texte est celui d'une chanson. La musique est d'abord faible, puis de plus en plus forte, puis elle diminue jusqu'à la fin.
Montrez que le texte impose ces changements de volume sonore.
A quel moment, dans quelle strophe la musique sera-t-elle la plus forte ?
Pourquoi ? (4 pts)
2°) Dans le premier couplet, l'auteur fait allusion au couple.
Expliquez les situations évoquées dans deux autres couplets que vous aurez choisis librement. (4 pts)
3°) Dégagez les idées essentielles. (4 pts)
4°) Developpement personnel : Le refrain d'une autre chanson affirme "La solitude, ça n'existe pas." Comparez cette affirmation à celle de Jacques Brel : "On
se retrouve seul." Quelle est l'affirmation qui vous semble la plus juste ?
Développez votre argumentation. (8 pts)
Certains candidats, devant leur page blanche, ont dû se sentir bien seuls. Ce qui leur a donné un formidable avantage...
(A suivre.)
Joël Fauré
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Brèves :
Le marathon des mots
Toulouse, la ville "prose"
J'avais presque oublié que Jules renard était aussi drôle et qu'il avait cherché à me ressembler en "tenant" un "blog"...
Le Marathon des Mots me l'a rappelé d'éblouissante manière. Et de la bouche même de Clémentine Célarié. Et dans quel cadre ! Rien moins que le Cloître des Jacobins. Je n'en demandais pas tant
!
Joie. Joie donc. Joies. Devant tant de beautés, épargné par le syndrome de Stendhal (Tiens, au fait, pourquoi donc n'est-il pas "l'invité absent" du prochain marathon des mo(r)ts, lui qui
trouvait Toulouse très laide, et avait écrit "qu'on y marche très mal sur des pavés comme des rognons en brochettes." (Pardon pour l'approximation, je cite de mémoire) Ce serait vraiment drôle,
n'est-il pas mon cher Gauthier Morax ?
Or donc, joie. Avec ce florilège de mots assemblés par mon ami Jules Renard, sur la vie, l'amour, les femmes, l'adultère, la mort.
J'avais aussi oublié que c'était un grand ami des bêtes.
Bref, tout pour me plaire.
Et maintenant, cadeau. C'est du Renard.
"Le mot renard m'effraie quand il n'est pas précédé de Jules."
"- Je n'ai pas parlé à ma femme depuis 2 ans.
- Vous êtes fâchés ?
- Non, mais je n'ose pas l'interrompre."
"Je mets de l'argent de côté. Mais pas du bon côté."
"- Pourquoi écrivez-vous sur votre père ?
- Vous voudriez que j'écrive sur Venise ? Mais je ne suis jamais allé à Venise."
Le 22 mai 1910, mort de Jules Renard, à 46 ans.
"- Faudra-t-il parler devant votre tombe
?
- Vous ferez comme vous voudrez, mais je ne vous répondrais pas."